Céline Robert                                                                       Année 2000-2001

Maîtrise de droit privé.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’abus de la personnalité morale des sociétés en droit français et en droit anglais.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Directrice du mémoire : Mme LeFichant.

Université de Nantes, Faculté de droit et de sciences politiques.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

SOMMAIRE

 

Introduction ………………………………………………………………………4

 

Section 1. Exposé des diverses formes d'abus de la personnalité morale…….11

A L'abus de la responsabilité limitée……………………………………………..11

§1 L'abus perpétré par une personne physique……………………………………12

§2 L'abus perpétré par une personne morale……………………………………...24

B L’abus de la personnalité juridique de la société………………………………30

§1 La société créée pour échapper à une obligation………………………………31

§2 Le cas particulier de la fraude fiscale……………………………………….…34

 

Section 2. Les conséquences de l’abus de la personnalité morale………….…40

A Conséquences relatives à la personne morale……………………………….....40

§1 Perte totale de la personnalité morale en droit français………………………..40

§2 Persistance de la personnalité morale……………………………………….....43

B Les conséquences relatives aux auteurs de l'abus de personnalité morale…….46

§1 Conséquences civiles…………………………………………………………..46

§2 Responsabilité pénale……………………………………………………….....53

 

Conclusion………………………………………………………………………..60

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Introduction:

 

Catherine Mondange a affirmé que « l’un des concepts clés des droits des sociétés modernes est la notion de personnalité séparée de la société. »[1] Parmi ces systèmes juridiques modernes droits français et anglais accordent tous deux la personnalité morale aux sociétés et « companies ».

 

Le terme français de société désigne traditionnellement un groupement de personnes dont le but est la réalisation de profits ou d‘économies et qui est doté de la personnalité morale. La « company » anglaise correspond également à un groupement doté de la personnalité morale. Toutefois cette forme n’est pas réservée par le droit anglais aux groupes à vocation lucrative ; associations, organismes de charité et clubs peuvent également l’adopter.

 

Les juristes ne se sont réellement intéressés à la théorie de la personnalité morale qu’à partir du XIXème siècle[2]. Droits anglais et français ont abouti à une conception similaire de celle-ci, à laquelle correspondant la définition proposée par Valérie Simonart[3]. « La personnalité morale est un concept qui désigne l’aptitude de certains groupements à être titulaires de droits et d’obligations qui leur confère la qualité de sujet de droits. » L’attribution de la personnalité juridique à un groupe de personnes réunies par un projet commun semble relever d’une nécessité pratique de la vie dans une société de droit. Certains de ses effets avaient d’ailleurs déjà été reconnus par le droit romain avant même que ne soit développée de théorie générale de la personnalité morale.

 

Au-delà de la similitude des droits anglais et français sur ce point, il faut noter une plus grande variabilité du concept de personnalité morale en droit français qu’en droit anglais. L’équivalent anglais de la société en nom collectif n’est pas qualifié de « company » mais a le statut particulier de « partnership ». Cette dernière ne dispose pas, contrairement à la société en nom collectif, de la personnalité morale. Fort intuitu personae et personnalité morale semblent incompatibles en droit anglais des sociétés. Les membres d’une « partnership » sont liés entre eux par un simple contrat de mandat. De plus, les sociétés à responsabilité illimitée (unlimited companies) sont très rares en Angleterre. Les hommes d’affaires qui ne sont pas intéressés par une limitation de leur responsabilité préfèrent souvent la souplesse de la « partnership ». Il n’y a pas en droit anglais une multitude de formes sociales. Les seuls choix pouvant être opérés par les fondateurs se limitent à la responsabilité limitée ou illimitée et au désir ou non de faire appel à l’épargne public. En conséquence l’attribution de la personnalité morale équivaut le plus souvent à la constitution d’un voile opaque entre la personne morale et son patrimoine d’un côté et les membres de la société et leurs patrimoines de l’autre côté.

 

Une autre différence majeure entre les conceptions française et anglaise de la personnalité est le plus grand formalisme du droit anglais. La personnalité morale est accordée dès l’accomplissement des formalités édictées par le Companies Act 1985 qui sont minimales et ne sont pas soumises à vérification. La création de société est donc très simple en Angleterre d’autant plus qu’il n’a pas de capital minimal pour les sociétés ne faisant pas appel à l’épargne public. En France l’immatriculation est une procédure plus complexe et soumise au contrôle du greffier.

 

Comme le remarque Catherine Mondange non seulement les sociétés se voient attribuer une personnalité juridique mais celle-ci est séparée de celles des membres.

 

En Angleterre, le principe de la séparation de la personnalité juridique de la société de celles de ses membres est basé sur la décision Salomon v Salomon Co Ltd[4] de 1897. M. Salomon exploitait depuis longtemps une affaire de marchand de cuir quand il décida de créer une société. Le capital de cette société était de 40 000l et était divisé en 40 000 actions de 1l chacune. 20 001 actions appartenaient à Salomon et 6 à sa femme et sa famille. Lorsque par la suite la société fut dissoute, le liquidateur voulu engager la responsabilité de Salomon à l’égard des créanciers de la société. La chambre des Lords rejeta cette requête et affirma que la société Salomon Co Ltd était une entité légale différente de Salomon. En conséquence, Salomon ne pouvait pas était tenu responsable des dettes de la société. Son patrimoine personnel n’était pas disponible pour les créanciers de la société.

 

Aujourd’hui encore les juridictions anglaises observent strictement ce principe. Les décisions Ord v Belhaven Pubs Ltd[5] et Williams v Natural Life Health Foods Ltd[6] l’illustrent. Dans la première décision, la Cour d’appel a refusé de tenir une société mère responsable des dettes de sa filiale. Dans la seconde décision, la Chambre des Lords a considéré que la faute d’une société qui avait négligemment donné des conseils n’engageait pas la responsabilité du gérant de la société.

 

Le droit français reconnaît également le principe de séparation de la personnalité juridique de la société de celles de ses membres. Les tribunaux ont tout d’abord construit ce principe à partir des articles 529 du Code civil et 59-3° du Code de la procédure civile. Ces deux articles font référence à des phénomènes qui ont été analysés par les juges comme étant des conséquences du principe. Aujourd’hui, c’est l’article 1842 du Code civil qui sert de base au précepte de séparation des personnalités juridiques. Il dispose que la société acquiert la personnalité morale après son immatriculation. Comme le remarque Christine Cutajar Rivière[7] le principe a été réaffirmé à de nombreuses reprises par les tribunaux[8] et approuvé de façon unanime par les auteurs[9]

 

Pourtant, aussi bien en France qu’en Angleterre ce principe connaît des limites, notamment celle de l’abus de la personnalité morale.

 

En Angleterre le principe est critiqué depuis longtemps. Le professeur Kahn Freud a été l’opposant le plus célèbre à la décision Salomon v Salomon & Co Ltd. Dans un article publié en 1944[10] il a qualifié la décision de calamiteuse[11]. Selon lui l’association du principe de séparation des personnes juridiques de la société de celles de ses membres à la facilité de création des sociétés en Angleterre conduit à une situation inacceptable dans laquelle les créanciers et autres tiers ne sont pas assez protégés. De même en France l’auteur Yves Guyon a mis l’accent sur les dangers auxquels sont exposés les tiers ayant affaire à des sociétés différentes mais avec de forts liens apparents[12].

 

Pour contrer les effets indésirables du principe de séparation des personnes juridiques, de nombreux systèmes juridiques ont admis que dans certaines circonstances la personnalité juridique pouvait être ignorée. Ce procédé est nommé en Allemagne et en Suisse "Durchgriffproblematik", "Durchgriffhaftung", en Belgique "effacement de la personnalité juridique", "mise à l'écart des effets de la personnalité morale", "relativité" ou "relativering du concept de la personnalité morale", "doorbraak van beperkte aansprakelijkheid", aux Etats Unis "piercing the corporate veil", en Angleterre "disregarding the corporate veil" et en France "abus de la personnalité morale".[13] Ces deux dernières notions sont le produit de deux approches très différentes.

 

La notion française d’abus de la personnalité morale a été utilisée pour la première fois par Pierre Chauveau[14] en 1938. Elle est récemment réapparue suite à son utilisation par Pascal Diener[15]. Dans une décision du 8 décembre 1989, la Cour d'appel de Paris a défini l’abus de la personnalité morale comme la création d’une société dans le but de cacher sa véritable personnalité aux tiers ou d’échapper à une incapacité[16].

 

Pourtant, la doctrine n’a pas encore réussi à établir une définition claire et exhaustive de cette notion. Dans une étude sur le sujet Nabil Fadel Raad s’en est tenu à faire la liste des situations considérées comme des abus de la personnalité morale.[17]. La notion d’abus de la personnalité morale est toutefois utileen ce qu’elle couvre toutes « les utilisations perverties de la personnalité morale"[18] et « permet aux juges d’empêcher que, protégée par la personnalité morale, une personne signe des actes ou exerce des droits qu’elle ne pourrait pas autrement ”[19]. L’étude de la jurisprudence françaises permet de découvrir que les abus les plus communs sont la création de sociétés fictives et/ou frauduleuses et la confusion de patrimoines.

 

En droit anglais, le principe de séparation de la personnalité juridique de celle de ses membres peut également être ignoré. Lord Wilberforce a affirmé dans la décision Re Westbourne Galleries Ltd[20]:

 

" ... une société à responsabilité limitée est plus qu’une simple entité juridique avec une personnalité propre… il y a la place en droit des sociétés pour la reconnaissance du fait que derrière elle ou parmi elle, il y a des individus avec des droits, des attentes et des obligations en tant que tels qui ne sont pas nécessairement dépassés par la structure sociétaire. »[21]

 

Lord Denning dans Littlewoods Mail Order Store Ltd v I.R.C a également insisté sur le pouvoir qu’ont les juges d’ignorer la personnalité juridique de la société :

 

"Le principe Salomon v Salomon & Co doit être étudié très attentivement. Il a souvent été supposé qu’il place un voile sur la personnalité morale de la société à travers lequel les juridictions ne peuvent pas voir. Mais ce n’est pas vrai. Les tribunaux peuvent et souvent enlèvent le voile. Ils peuvent et souvent enlèvent les masque. Ils regardent pour voir ce qu’il y a réellement derrière. Le législateur a montré le chemin avec les règles comptables et le reste. Et les juridictions devraient suivre." [22]

 

Même si les limites de la personnalité morale sont reconnues par les juges anglais, la notion d’abus de la personnalité morale est rarement utilisée. La doctrine dénonce seulement occasionnellement les abus de la personnalité morale[23]. A l’utilisation d’une notion couvrant toutes les utilisations illégitimes de la personnalité morale, les auteurs anglais préfèrent considérer l’ensemble des circonstances dans lesquelles le voile de la personnalité morale va être levé. Ce sont les conséquences plus que les causes qui sont mises en avant. Un débat entre les auteurs a eu lieu pour savoir quelle est l’expression correcte à utiliser pour qualifier le phénomène. En pratique, l’expression la plus communément utilisée est le « lever du voile »[24], expression d’origine américaine. Staughton L.J. dans Atlas Maritime Co SA v Avalon Ltd (N°1)[25] a tenté de préciser la terminologie:

 

"Percer le voile de la personnalité morale est une expression que je réserverais au traitement des droits ou obligations ou activités d’une société comme étant les droits ou obligations ou activités de ses membres. Lever ou regarder derrière le voile de la personnalité morale par contre devrait correspondre à la prise en considération des associés dans un but légal."[26]

 

Ces distinctions sont rarement utilisées par les juges et les auteurs.

 

Malgré la difficulté rencontrée dans les différentes tentatives de définition de l’abus de la personnalité morale, l’étude des jurisprudences anglaises et françaises révèle un critère récurrent dans les décisions des juges : Le motif de la création de la société. Celui doit être conforme à l’intention du législateur.

 

Dans la décision Salomon v. Salomon & Co Ltd[27] les juges avaient refusé que le voile ne soit levé parce que, selon Lord Halsbury L.C., l’utilisation qui avait été faite de la personnalité morale n’allait pas au-delà de ce qui était prévu par le Parlement dans le Company Act. De même, la doctrine française considère comme étant un élément fondamental le but poursuivi par ceux ayant recourt à la forme sociale pour déterminer s’il y a ou non abus.

 

Comparer l’abus de la personnalité morale en droit anglais et en droit français présente donc l’intérêt de mettre à nu l’idée que se font les législateurs puis les juges  français et anglais du rôle de la forme sociale.

 

Définir l’abus de la personnalité morale de façon conforme à la fois au droit anglais et français présente la difficulté de devoir réunir une conception basée sur les causes (« l’abus de la personnalité morale ») et une conception mettant l’accent sur les conséquences (« lifting the veil »). Il est possible de les réunir en définissant l’abus de la personnalité morale comme la circonstance dans laquelle le voile de la personnalité morale est levé pour une raison relative à l’illégitimité de l’utilisation faite de la forme sociale. Sont inclus ainsi à la fois les différents abus de la personnalité morale français et ses deux principaux foyers, contractuels et légaux[28], ainsi que les levers non-amicaux de la personnalité morale reconnus par le droit anglais. Sont donc légitiment exclues les situations dans lesquelles le voile est levé au bénéfice des associés, même si elles sont inclues dans la définition classique du lever du voile par la doctrine anglaise.

 

Dans cette étude seront tout d’abord comparées les situations considérées comme constituant un abus de la personnalité morale en droits anglais et français(I) puis les conséquences attachées à la découverte d’un abus(II).

 

 

 

 

 

Section 1. Exposé des diverses formes d'abus de la personnalité morale

 

La notion d’abus de la personnalité morale couvre une telle diversité d’actes et de manœuvres, qu’elle en devient floue. L’étude des décisions de justice permet de constater qu’une caractéristique précise attire généralement l’intérêt de l’individu qui commet l’abus. La responsabilité limitée présente un intérêt particulier dans la mesure où elle a des conséquences patrimoniales directes. Elle est l’attribut de la personnalité morale des sociétés le plus communément objet de l’abus (A). Toutefois la personnalité morale de la société hors de l’autonomie patrimoniale peut également susciter l’intérêt de personnes ayant un but tout autre que l’exploitation d’une affaire (B).

 

A L'abus de la responsabilité limitée

 

La responsabilité limitée a pour conséquence la séparation des patrimoines des associés de celui de la société. Les créanciers des uns ne peuvent pas se reporter sur l'autre et inversement. Toutefois, il ne faudrait pas oublier que toutes les sociétés ne bénéficient pas de cette caractéristique. En Angleterre, les sociétés en nom collectif sont qualifiées de « partnerships » et non de « companies » et très peu de « companies » sont à responsabilité illimitée. Alors qu’en France, les sociétés à responsabilité illimitée sont bien plus nombreuses. Ces cernièers ne pouvant être l'objet de ce type d'abus, elles ne seront pas considérées dans la première partie. Par contre, tous les types de sociétés peuvent être affectés par un abus des autres caractéristiques de la personnalité morale.

 

Les associés dont le patrimoine est protégé par la limitation de la responsabilité peuvent être des personnes physiques ou morales. Les deux situations seront traitées séparément parce que le type d'abus perpétré par ces deux types de personne juridique est très différent, même si ces différences sont plus économiques que légales[29].

§1 L'abus perpétré par une personne physique

 

Parmi les abus de la limitation de la responsabilité qui peuvent être perpétrés par une personne naturelle il faut distinguer ceux qui existent à la création de la société et ceux apparus après la création de la société.

 

a) L'abus: motif de la création de la société

Le principe de la responsabilité limitée peut être utilisé par des individus qui désirent protéger leurs biens des risques inhérents à l'exploitation d'une affaire. Cela est en soi un but légitime qui peut être le critère déterminant de la décision de créer une société. Cette protection est longtemps restée aussi bien en droit anglais qu’en droit français un privilège dont ne pouvait bénéficier une association d’au moins deux personnes. Un nombre minimum d'associés était nécessaire à la création d'une société. Toutefois, attirés par la limitation de leur responsabilité, certains hommes d'affaire travaillant seuls ont essayé de créer une société à responsabilité limitée pour protéger leurs biens personnels. La limitation de la responsabilité peut également être utilisée pour protéger certains biens précis des velléités des créanciers. Droits anglais et français réagissent différement face à de telles pratiques.

 

1° L’entrepreneur individuel créant sa société
- Avant la reconnaissance de la société à membre unique

En France la société est traditionnellement perçue comme un outil permettant à un groupe de personnes de mettre leurs biens et leur savoir-faire en commun pour générer des profits ou réaliser des économies[30]. Jusqu'en 1985 la loi exigeait un minimum de deux membres pour toutes les sociétés et de sept pour les S.A. En réponse, certains hommes d'affaires ont eu recours à des prête-noms ou des sociétés en sommeil pour créer, seuls, une société à responsabilité limitée.

 

Par l'usage de prête-noms le maître de l'affaire se cache derrière des hommes de paille qui signent le contrat de société sans avoir l'intention réelle de devenir associés. Ce procédé est analysé par la doctrine comme étant un type particulier de simulation utilisant le mandat. Dans le cadre d'une simulation sont distingués l'acte ostensible et l'acte caché. Le premier est le contrat tel qu'il apparaît aux tiers et le dernier le contrat tel qu'il est réellement. L'utilisation de prête-noms lors de la création d'une société donne au public l'impression que ces individus sont effectivement des associés alors qu'ils ne sont que les mandataires du maître de l'affaire. Le droit français n'interdit pas l'utilisation de prête-noms dans la mesure où il n'y a pas de fraude[31]. Dans le cas inverse, l’adage « fraus omnia corrumpit » permet aux juges français de punir les usages de la personnalité morale faits en fraude aussi bien à la loi qu’aux droits des tiers. Hors, chercher à créer une société unipersonnelle est analysé par les tribunaux comme une fraude à la loi[32].

 

Les juridictions françaises sont particulièrement susceptibles de reconnaître une telle fraude quand un associé détient l'écrasante majorité du capital[33]. Sont également pris en compte des facteurs tels que la nature des relations entre les associés et le fait que l'affaire aie été préalablement exploitée par un seul individu.

 

Pascal Diener croit pourtant remarquer un certain laxisme des tribunaux dans ce domaine face à la multiplicité de fait des sociétés unipersonnelles qui contribuent substantiellement à la vie économique[34].

 

En Angleterre, le principe établi par l'arrêt Salomon semble exclure tout raisonnement similaire au raisonnement français. Ainsi que Landley M.R. l'a remarqué dans l'arrêt Re Darby[35]:

 

« [L'arrêt Salomon] a décidé qu'une société peut légitimement être formée sous le Company Act par une ou deux personnes, le restant étant des hommes de paille, et il n'y a actuellement aucune méthode ne permettant d'y mettre fin, si ce n'est la liquidation. [36]»

 

La société créée par Salomon avait toutes les caractéristiques pouvant mener les juges français à penser que seul le maître de l'affaire était un vrai associé. Avant la création de la société Salomon Co Ltd, Salomon avait géré seul son affaire, les autres associés étaient des membres de la famille de Salomon, qui de son côté détenait la majorité du capital. Le droit français aurait analysé le mécanisme comme étant une utilisation frauduleuse du système de prête-nom et donc un abus de la personnalité morale.

 

La Chambre des Lords s'est refusée à une telle interprétation, et a décidé que la création de Salomon Co Ltd était parfaitement légitime et non contraire à l'intention et à la signification du Companies Act 1862[37]. La principale conséquence de cette approche a été d'affaiblir la portée pratique de l'exigence par le droit anglais d'un nombre minimum de membres puisque que de simples mandataires peuvent être utiliséspour atteindre ce nombre[38].

 

Un autre moyen d'atteindre artificiellement le nombre minimum de membres exigé par la loi est l'utilisation de la personnalité morale de sociétés qui ne servent pas à l'exploitation d’une affaire.

 

En France, l'homme d'affaire aura pour cela recours à des sociétés en sommeil. Une société en sommeil est définie comme une « une société économiquement morte, mais juridiquement vivante »[39]. Cela regroupe donc à la fois les sociétés n'ayant jamais eu d'activité et celles dont l'activité a cessé.

 

Pour certains auteurs l'exigence jurisprudentielle de l'affectio societatis rend illégales les premières[40] . La Cour de cassation a défini la notion d'affectio societatis dans une décision du 3 juin 1986[41] comme étant la volonté des associés de collaborer effectivement « à l'exploitation dans un intérêt commun et sur un pied d’égalité, chacun participant aux bénéfices comme aux pertes ». Une société dépourvue d'affectio societatis est qualifiée de fictive. De plus, l’utilisation de la personnalité juridique de telles sociétés dans le but d’atteindre artificiellement de nombre exigé d’associés est de nouveau neutralisé par l’adage « fraus omnia corrumpit » en tant que fraude à la loi.

 

Des dispositions spécifiques viennent compléter l’arsenal juridique contre de telles sociétés. L'article 42-1 du décret du 30 mai 1984 régule le sort des sociétés ayant cessé toute activité économique. Il donne au juge, sur saisie du greffier, la possibilité d'ordonner la radiation d'une société dont la cessation d'activité a été signalée il y a plus de deux ans. La radiation n'affecte toutefois pas la personnalité morale de la société, pour cela le juge doit ordonner une dissolution. Hors des cas spécifiques de fraude, il faut noter que les juges se montrent généralement indulgents face aux techniques d'organisation utilisées par les entreprises. La mise en sommeil d’une société est considérée comme une telle technique. « Entre un statut juridique qui se porte mal et une entreprise qui se porte bien, [ils] préfèrent la seconde »[42].

 

Le droit anglais fait également preuve d’une grande tolérance à l'égard des équivalents des sociétés en sommeil: les « shelf-companies ». Elles sont souvent créées par des banques, avocats ou agences spécialisées[43]. Le principe en droit anglais est celui de l'indifférence de l'objectif pour lequel la société a été créée. Les sociétés en sommeil peuvent donc prospérer. La principale conséquence de cette approche a été d'affaiblir la portée pratique de l'exigence par le droit anglais d'un nombre minimum de membres. Puisque la personnalité juridique d'une société économiquement morte peut être utilisée[44] pour atteindre ce nombre.

 

Toutefois, les conséquences d'une application trop rigide du principe issu de l'arrêt Salomon ont été un moment atténuées par l'utilisation de la théorie du mandat. Ainsi, certains juges ont cru pouvoir découvrir un contrat de mandat entre la société et l'associé qui a une place anormalement prédominante dans la société. Celui devenait par conséquence responsable de tous les actes signés par la société. C’est ce raisonnement qu’a suivi Lord Denning, juge connu pour avoir un sens de l’équité qui domine parfois sa rigueur juridique, dans la décision Wallersteiner v Moir (N°2)

[45]:

 

« Il m'est clair que les sociétés du

Liechtenstein n'étaient que les marionnettes du Dr Wallersteiner. Il contrôlait chacun de leurs mouvements. Chacune dansait selon son bon vouloir. Il tirait les ficelles. Personne d'autre n'avait d'emprise sur elles. Traduit en langage juridique, elles étaient mandatées par lui pour faire ce qu'il ordonnait. Il était le mandataire derrière elles. Je pense que la cour devrait ignorer le voile de la personnalité morale et traiter ces sociétés comme étant ses créatures_ les actions desquelles il devrait être et est responsable. »

 

La décision Yukong Line Ltd v Rendsburg Investments Corporation (N°2)[46] a mis un terme à de tels raisonnements en affirmant qu’il ne saurait y avoir de contrat de mandat hors de la volonté expresse des personnes concernées.

 

- Conséquences de la reconnaissance  légale de la société unipersonnelle à responsabilité limitée

La douzième directive du droit des sociétés sur les sociétés unipersonnelles à responsabilité limitée[47] est la conséquence d’un mouvement constaté au sein de certains pays européens de reconnaissance des sociétés unipersonnelles à responsabilité limitée. Cette directive a eu pour but d’harmoniser la législation dans ce domaine et les pays qui ne reconnaissaient pas encore ce type de sociétés, dont la Grande-Bretagne, ont du modifier leur législation en conséquence. La Grande Bretagne a transposé cette directive par le Companies (Single Member Private Limited companies) Regulation 1992[48].

 

La France avait anticipé le mouvement par une loi de 1985[49]. Chacune des législations nationales reflète l'esprit des deux systèmes juridiques. Alors qu'en France, une nouvelle forme de société a été créée: l'E.U.R.L. En Grande-Bretagne, où il n'y a qu'une forme de société, a simplement été abandonné l'exigence pour les sociétés ne faisant pas appel à l'épargne public d'un nombre minimum de membres[50]. Si en Angleterre la section 24 n'a jamais eu une très grande portée, par contre en France la notion de l'affectio societatis a été bouleversée par l'introduction de l'E.U.RL. Un membre seul ne peut être animé de la volonté de collaborer avec lui-même. Pour B. Maubru le législateur semble avoir décidé par cette loi de reconnaître « une pratique impossible à enrayer »: la création de sociétés dépourvues d'affectio societatis[51].

 

2° L'utilisation de la limitation de la responsabilité par une personne physique pour se protéger de ses créanciers

 

Le droit anglais punit l'utilisation d'une société à responsabilité limitée pour protéger ses biens personnels des velléités de ses créanciers. Une telle société est dénoncée comme étant une

pure feinte[52], une façade. Dans l'arrêt Snook v. London and West Riding Investments Ltd[53] Diplock L.J. a défini cette notion. Il a affirmé que des actes ou des documents sont une feinte lorsque toutes les parties aux actes ou documents ont l'intention commune que les actes ou documents en question ne créent pas les droits et obligations qu'ils semblent créer. Il s’agirait donc d’une notion proche de la simulation. L’étude de la jurisprudence révèle autre chose. Dans l’arrêt In re Carl Hirth, exp. p Trustee[54], un homme d'affaire nommé Hirth, dont la banqueroute personnelle avait été déclarée, avait transféré, avant que les mesures relatives à sa banqueroute ne soient prises, ses biens vers une société à responsabilité limitée. Pour Lindley M.R., cette société n'était qu'une feinte, Hirth était la société. Le juge a également considéré que l'arrêt Salomon ne l’empêchait pas de prendre une telle décision car il ne répondait pas à la question de savoir "si les créanciers d'un homme d'affaire qui s'était transformé en société et avait transféré tous ses biens à la société ne pouvaient pas s'opposer à la transaction soit en tant que fraude sur la base de la loi ou en tant qu'acte de banqueroute sur la base du Bankrupcy Act[55]." L'opposition des créanciers au transfert de biens fut donc accordée. Un raisonnement similaire a ensuite été suivi dans de nombreuses autres décisions: In re Slobodinsky[56], Gonville's Trustee v Patent Caramel Co Ltd[57], In re Fasey, ex p Trustees[58]. Toutes ces affaires auraient pu être résolues en droit français par la théorie de la fraude, et il est évident que l’élément essentiel de ces créations de société est leur motif frauduleux. Il semble donc qu’en droit des sociétés le concept de feinte prenne une toute autre signification que celle de droit commun. Farrar[59] a qualifié cette notion de « référence illusoire utilisée par les tribunaux pour exprimer leur désapprobation de l’usage de la personnalité morale pour échapper à des obligations. »[60] Cette dérive de la notion de feinte a même conduit Jennifer Payne[61] à préférer le terme de fraude pour décrire le phénomène.

 

En droit français c'est généralement la notion d'affectio societatis qui permet de lutter contre de tels procédés. Les juges ont également parfois recours à la notion générale de fraude puisque le but poursuivi est de priver les créanciers de leurs droits. En pratique, les créanciers se contentent généralement de demander l'annulation de l'acte de transfert[62] comme en droit anglais. Ils attaquent rarement la société dans sa totalité.

 

b) Les abus apparaissant dans une société originellement légitime

Une fois acquis le bénéfice de la limitation de la responsabilité, il n'est conservé que dans la mesure où certaines règles sont respectées. Ainsi que l'ont remarqué Mayson & French:

 

"Puisque la personnalité morale d'une société n'apparaît qu'une fois satisfaites les exigences du Companies Act, il n'est sans doute pas surprenant que le législateur souhaite imposer des sanctions, dont la responsabilité personnelle, sur les personnes qui violent certaines exigences fondamentales.[63] »  

 

Les droits anglais et français considèrent tous deux que durant la vie de la société peuvent apparaître des abus de la personnalité morale sous la forme du non-respect de l’autonomie patrimoniale de la société ou de son utilisation abusive.

1° Les formes d’abus reconnues par la loi

 

En droit français comme en droit anglais les abus de la personnalité morale spécifiquement envisagés par la loi sont principalement sanctionnés à l’occasion d’une liquidation. Ainsi, ces dispositions apparaissent en droit anglais dans l’Insolvency Act 1986 et dans le titre II du Code de Commerce intitulé « Du redressement et de la liquidation judiciaires des entreprises » en droit français.

 

La section 212 de l’Insolvency Act 1986 sanctionne le « gérant délinquant [64]», auteur d’une exécution défectueuse de ses obligations à l’égard de la société[65]. Avant l’introduction de cette section les juges anglais reconnaissaient déjà le non-respect de l’autonomie patrimoniale de la société par l’utilisation des biens de la société à des fins personnelles mais ils ne sanctionnaient pas la négligence[66]. Comme le fait remarquer Mohammad R. Pasban[67], la section 212 inclut par contre désormais la violation de l’obligation de vigilance et donc la négligence parmi les actes réprimés. La négligence est une notion comprenant à la fois le manque d’attention portée aux affaires de la société et le comportement gravement irresponsable[68] d’un gérant.

 

Les comportements sanctionnés par la section 212 sont visés en droit français  par les articles L624-3 et L624-5 du Code de commerce (anciennement articles 180 et 182 de la loi du 25 janvier 1985). Ce que le droit anglais qualifie de négligence est caractérisé comme une faute de gestion, sanctionné par l’article L624-3 en droit français[69]. La différence entre les deux droits consiste alors en l’exigence par l’article L624-3 d’un lien de causalité entre le comportement du dirigeant et l’insuffisance d’actif, cette exigence est absente de la section 212. Même si en pratique cette exigence est minimisée par le fait que le lien peut être indirect et que l’acte considéré n’a pas à être la cause principale ou unique[70].

 

L’article L624-5 sanctionne entre autres l’abus de biens (1°), l’abus de confiance (2°) et le détournement de la société à des fins personnelles(3°, 4°, 6). Ces comportements sont également déclarés répréhensibles par la section 212 en ce qu’elle punit la violation de l’obligation d’un dirigeant à l’égard de sa société. Cette obligation est définie comme une celle d’une loyauté non partagée[71] envers la société.

 

Il n’existe pas en droit français de réel équivalent des sections 213 à 215 de l’Insolvency Act 1986. L’originalité des ces dispositions réside en ce qu’elles sont orientées du point de vue du créancier impayé. Elles introduisent les notions de « fraudulent trading » et de « wrongful trading » qui constituent selon le professeur Gower «  l 'exception la plus extrême à la règle établie par l'arrêt Salomon à laquelle est parvenu le Royaume-Uni. [72]»

 

Le  « fraudulent trading » est le fait de gérer une société avec l'intention de frauder les créanciers de cette société ou tout autre créancier ou pour tout autre but frauduleux. La notion a été précisée par deux arrêts. Dans Re Patrick Lyon Ltd[73], Maugham J. a déclaré que « les mots ‘frauder’ et  ‘but frauduleux’ supposent une malhonnêteté réelle incluant, selon les notions actuelles d'échanges justes parmi les hommes d'affaires, un réel blâme moral. »

[74] Dans Re William C. Leicht Ltd[75], le même juge a précisé que :

 

"si une société continue de faire des affaires et de créer des dettes à un moment où il n'y a à la connaissance du directeur plus de raisonnables perspectives pour les créanciers d'être payés, il est correct en général, de déduire que la société est exploitée avec l'intention de frauder.

[76]"

 

La section 214 a été introduite en 1986, suite aux recommandations du comité Jenkins de 1962 puis du comité Cork de 1981. Elle concerne le « wrongful trading », qui apparaît quand :

 

§         une société est insolvable à sa liquidation.

§         une personne savait ou aurait du déduire, à ce moment qu'il n'y avait aucune perspective pour la société d'éviter d'être liquidée en état d'insolvabilité.

§         cette personne était gérante à ce moment.

 

Dans le cadre de ce test le gérant est jugé par rapport à ce qui peut être attendu d'une personne exerçant ses fonctions[77]. Il ne sera pas puni s'il a entrepris toutes les démarches qu'il aurait du pour minimiser les pertes potentielles des créanciers de la société.

 

Le défaut d’équivalent au « wrongful trading » et « fraudulent trading » en droit français n’empêche pas la répression de ces comportements. Les juges français peuvent sur la base de l’article 1167 du Code civil écarter toute transaction ayant pour but de frauder les créanciers. Les comportements qualifiés de « wrongful trading » par le droit anglais peuvent être sanctionnés par les juges français en utilisant les articles L624-3 et L624-5 du Code de commerce. La notion de faute de gestion est large. Cozian la définit comme étant un manque de bon sens[78]. Le défaut de réaction et de réalisme des gérants d’une société au bord de la liquidation peut donc être pénalisé par l’article L624-3[79]. De plus, le 4° de l’article L624-5 qui concerne le fait de poursuivre abusivement une exploitation déficitaire dans un but personnel permet également de sanctionner une forme particulière de « wrongful trading ».

 

Le droit anglais semble également punir tous les comportements énoncés par l’article L624-5. Le fait de disposer des biens de la société comme des siens propres (L624-5 1°), d’accomplir des actes de commerce dans un intérêt personnel (L624-5 2°), l’usage abusif des biens ou de crédit de la personne morale dans un intérêt personnel (L624-5 3°), la poursuite abusive d’une exploitation déficitaire dans un but personnel (L624-5 4°) constituent clairement une exécution défectueuse des obligations du dirigeant à l’égard de la société. Il est en de même pour les irrégularités comptables (L624-5 5° et 7°) et de détournement ou la dissimulation d’une partie de l’actif ou l’augmentation frauduleuse du passif de la personne morale (L624-5 6°).

 

Sur ce point les droits anglais et français semblent donc être similaires. Ils diffèrent toutefois sur un aspect. En droit anglais la section 458 du Companies Act 1985 permet de sanctionner pénalement l’individu coupable de « fraudulent trading » même si la société n’est pas en liquidation.

 

2° Les formes d’abus reconnues par la jurisprudence

 

Hormis la législation précitée, pour la reconnaissance d’un abus de la personnalité morale apparu au cours de la vie de la société, il faut se référer à la jurisprudence.

 

Les juges français sanctionnent la confusion totale de patrimoines. Il s’agit des situations dans lesquelles "les biens de la société et du maître de l'affaire ont été mélangés de façon telle que la société ne soit qu'une société de façade"[80]. Selon l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 16 décembre 1987[81], il s'agit de démontrer que « l'ensemble constitue une entité juridique et économique poursuivant un but identique fonctionnant sous le contrôle d'un animateur unique qui leur impose une politique sociale et commercial unique. » Il faut noter que la confusion de patrimoines est parfois considérée comme un simple élément de la fictivité de la société[82], alors que d’autres auteurs la voient comme une notion autonome[83]. Une société peut également apparaître au cours de la vie de la société si l’affectio societatis disparaît.

 

En ce qui concerne les situations non spécifiquement envisagées par la loi, les juridictions anglaises voient par contre rarement un abus. Dans Woolfson v Strathclyde Regional Council[84] , la chambre des Lords a affirmé que le principe établi par Salomon ne pouvait être ignoré que si une société n’est qu’une « façade masquant la réalité ». La confusion de patrimoines ne peut être punie en droit anglais que sur la base de la section 212 de l’Insolvency Act et donc suite à la liquidation de la société.

 

§2 L'abus perpétré par une personne morale

 

La limitation de la responsabilité d’une société peut être abusivement utilisée par une autre personne morale. L’abus est parfois le motif même de la création de la société ou il peut apparaître au cours de la vie de la société. Dans ce dernier cas il s’agira alors souvent de protéger les biens d’une société en difficulté.

 

a) L’abus: motif de la création de la société

Les sociétés peuvent être tentées de créer des filiales, qui bénéficient d'une personnalité juridique distincte, pour se protéger des risques de l'exploitation de certaines affaires jugées à risque. Le principe, qui existe en droit anglais comme en droit français, est qu'une société mère ne peut être tenue responsable des dettes de ses filiales.

 

Comme le professeur Gower l'a remarqué:

 

 "Si une filiale est insolvable à sa liquidation il n'y a rien d'autre que la pression du public et l'opinion du marché, pour empêcher la société-mère de liquider la filiale et de laisser ses créanciers sans espoir d'être payés, même si le groupe est parfaitement solvable."[85]

 

Cette pratique peut toutefois être qualifiée d'abusive dans certaines circonstances aussi bien en France qu'en Angleterre.

 

Tout d’abord, les sections 212 à 215 de l’Insolvency Act 1986 peuvent être utilisées pour sanctionner des abus émanant d’autres sociétés si celles-ci se sont comportées comme des directeurs de droit ou de fait. La jurisprudence admet par ailleurs deux exceptions au principe établi par l’arrêt Salomon. Tout d’abord, le cas où la société n’est qu’une simple feinte. Les juges reconnaîtront alors un abus de la personnalité morale. Deuxièmement, les juridictions anglaises ont parfois cru pouvoir découvrir un contrat de mandat entre deux sociétés. Ainsi Atkinson J. dans Smith, Stone & Knight Ltd v Birmingham Corpn[86] a décidé que l'existence d'une telle relation entre la société mère et sa filiale était une question de fait et à ensuite établit six critères permettant d'y répondre. Cette approche a été tout d'abord suivie[87]. Elle a ensuite été rejetée comme pour les personnes physiques par l’arrêt Yukong Line Ltd v Rendsburg Investments Corporation (N°2)[88] qui a établit que si les associés n'ont pas l'intention de faire de la société leur mandaté alors aucun mandat ne peut être établit. Il est donc désormais très difficile de rendre responsable une société mère des dettes de la filiale par la théorie du mandat.

 

Les juges français sont plus disposés à reconnaître un abus de la personnalité morale. Une société peut être considérée fictive si elle est totalement contrôlée par une autre[89]. Les critères utilisés sont les mêmes que pour les personnes physiques se cachant derrière une société. Toutefois le fait qu’une société mère détienne la grande majorité des parts d’une filiale ne suffit pas à ce que celle-ci soit considérée fictive. Par exemple dans une décision de la Cour de Cassation du 7 janvier 1946[90], une filiale détenue à 98,75 % par sa société mère n’a pas été considérée fictive. De même si les deux sociétés ont les mêmes directeurs mais que leurs patrimoines sont distincts, il n’y a pas fictivité[91]. Par contre si le directeur traite la filiale comme une simple succursale la limitation de la responsabilité n’est plus efficace. La confusion de patrimoines est également un facteur très important. Elle est souvent caractérisée par une communauté des moyens matériels utilisés, des moyens commerciaux et techniques[92]. La théorie de l’apparence, étudiée plus loin, permet également aux juges de sanctionner certains abus de la personnalité morale. Enfin la théorie de fraude s’applique également aux rapports entre sociétés : la création de filiales pour porter atteinte aux droits des créanciers est illégale[93].

 

Des dispositions spécifiques au droit du travail démontrent la volonté du législateur français d’éviter aux plus faibles d’être les victimes du principe de l’autonomie patrimoniale des sociétés. Une société mère peut être déclarée solidairement responsable des dettes de ses filiales à l’égard des employés de ces dernières, si elle leur a donné des instructions d’embauche ou si elle a donné des instructions de travail aux employés[94]. Par contre, les juridictions anglaises semblent être particulièrement sévères à l’égard des employés souhaitant ne pas subir les conséquences d’une utilisation extrême de la limitation de la responsabilité. Selon l’étude de Charles Mitchell un abus a été reconnu que dans 17% des cas où le demandeur était un employé alors que la moyenne avoisine les 50%[95].

 

Pour les sociétés en liquidation, les articles L624-3 et L624-5 du Code de commerce s’appliquent également aux sociétés agissant comme le directeur de droit ou de fait d’une autre société.

 

Le cas le plus caractéristique de l’utilisation abusive de la limitation de la responsabilité au bénéfice d’une autre société est celui des « single-ship companies ». Un armateur désire limiter les conséquences de tout incident impliquant l’un de ses bateaux, telle que la perte de la marchandise qu'il transporte. Pour cela il crée autant de sociétés qu'il a de bateaux. Ainsi, le client dont la marchandise a été perdue suite au naufrage d'un navire, ne peut pas être payé sur les autres bateaux de l'armateur qui sont la propriété d'autres sociétés.

 

L’affaire de The Coral Rose[96] impliquait un tel mécanisme de protection artificielle de biens et pourtant Lord Justice Staughton a affirmé:

 

« La création ou l’achat d’une filiale avec une responsabilité minimale qui fonctionnera avec les fonds de sa société mère et sur les instructions de sa société mère mais n’engagera pas la responsabilité de la société mère peut sembler ne pas être la manière la plus honnête de faire des affaires. Mais cela est très courant dans l’industrie du transport maritime international. Décider que cela crée une relation de représentation entre la filiale et la société mère serait une doctrine révolutionnaire. »[97]

 

Bien entendu la révolution n’a pas eu lieu et il apparaît donc que le droit anglais est démuni faire à ce type d’abus.

 

Les juges français par contre, peuvent lutter contre de telles techniques en utilisant la théorie de l'apparence. Selon celle-ci le client qui croyait contracter avec l'entreprise dans sa totalité, peut se faire accorder les droits qu'il aurait si effectivement il avait contracté avec l'ensemble des petites sociétés. La théorie de l’apparence a été utilisée par le Tribunal de commerce de Nantes contre des « single-ship companies ». Il a été considéré dans une ordonnance de référé du 22 mai 1984[98] que les navires en question étant exploités par le même armateur-gérant, le fait qu’ils soient la propriété de sociétés différentes ne saurait masquer la communauté d’intérêt apparente. Cette théorie a également été appliquée hors du domaine maritime. Ainsi dans l’affaire Sté Econocom location et a. c./ GIE Gestion croissance, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a rendu solidairement responsables plusieurs sociétés d'un groupe informatique qui se donnait l'apparence d'une société unique, disposant des même locaux, ayant le même numéro de téléphone, le même logo[99].

 

L'argument de l'entité économique unique[100] a été mis en avant devant les juridictions anglaises dans le cas d'attributions de compensations. Dans DHN Food distributors Ltd v London Borough of Tower of Hamlets[101], Lord Denning a permis à une société ayant des liens étroits avec une autre société de recevoir une compensation  qu'elle ne pouvait obtenir que si les deux sociétés étaient perçues comme une entité unique. Depuis, les cours anglaises se sont montrées beaucoup plus réticentes à tenir compte des liens entre les sociétés. Ainsi, dans Adams v Cape industries Pty Ltd[102] il a été jugé que chaque société est une entité distincte et que cette séparation devait être strictement respectée. De fait la levée amicale du voile de la personnalité morale[103] est donc devenue difficilement envisageable.

 

Le droit français reconnaît un autre type d'abus pouvant être perpétré par des personnes morales: la division artificielle d'une seule entreprise en sociétés différentes. La Cour d'appel de Paris du 16 novembre 1993[104] a affirmé que « la fictivité au sein d'un groupe de sociétés ne concerne pas seulement les rapports entre société mère et filiales mais aussi les rapports entre filiales[...] Deux sociétés peuvent sous le couvert de personnes morales distinctes ne former qu'une seule entreprise sans que nécessairement elles forment une seule entité avec la société mère. ».

 

Ainsi, l’approche française des groupes de société peut aboutir à la découverte d’un abus de la personnalité en dehors de tous dessein clairement illicite dans la création de la société. Une évolution dans ce sens du droit anglais est vivement souhaitée[105], mais elle n’a pas encore été réalisée.

 

b) La société en difficultée

Il peut être tentant de transférer les biens d’une société allant à la dérive vers une autre société afin de les protéger des assauts des créanciers qui ne tarderont sûrement pas à se manifester. Si les associés désirent continuer la même entreprise par le truchement d’une autre société, ils souhaiteront sûrement conserver un nom semblable à celui de la première société afin de conserver leurs clients. La section 216 de l’Insolvency Act sanctionne une telle manœuvre. Elle interdit que le dirigeant d’une société dissoute il y a moins de 12 mois ne soit lié d’une quelconque manière avec une nouvelle société dont le nom avoisine celui de l’ancienne société[106].

 

Cette disposition particulière, dont il n’existe pas d’équivalent en droit français, ne couvre évidemment pas toutes les formes d’abus possibles en ce domaine. Si le nom de la société vers laquelle les biens sont transférés est différent les juges anglais pourront toujours dénoncer comme étant une pure feinte la société vidée de ses possessions. Elle est alors remplacée dans le contrat qui la liait au créancier par la nouvelle société et celui-ci pourra se reporter contre elle[107]. Ainsi dans Creasy v Breachwood Motors Ltd[108] une société avait transféré ses biens vers une société nouvellement créée pour faire échec à l'application d'un jugement pour licenciement abusif. Le dispositif a été mis à nu par les juges. L’ambiguïté de la notion de feinte apparaît clairement dans cette décision. C’est le motif de la manœuvre opérée qui a été pris en considération. La notion de feinte apparaît donc plus comme étant la sanction de l’abus (la substitution des deux sociétés) que le type d’abus puni, qui est l’utilisation de la personnalité morale à des fins frauduleuses. Une telle confusion a évidemment suscité des critiques, selon Lord Cooke la notion de feinte ou de façade est « «inutile et malsaine »[109]. De même Cheong Ann Png[110] a remarqué que le même résultat aurait pu être atteint dans Creasy v Breachwood Motors Ltd par le recours à la notion de responsabilité civile économique. Cela aurait permis d’éviter le recours à la « notion ambiguë de façade ». Depuis, Hoshouse LJ dans Ord v Belhaven Pubs Ltd [111] a insisté sur l’élément d’impropriété ou de fraude. Il est selon lui déterminant pour décider s’il y a un abus. Le juge a toutefois adopté une position de tolérance à l’égard des méthodes d’organisation des groupes de sociétés. Il a exprimé sa désapprobation de la solution de l’arrêt Creasy.

 

Au niveau légal, les créanciers victimes d’une fraude à leur droits peuvent espérer profiter, à la liquidation de la société, des effets des sections 212 et 423 de l’Insolvency Act. L’action prévue par la section 212 peut être introduite uniquement par le liquidateur que le créancier devra donc persuader. Quant à la section 423 elle permettrait au créancier de demander l’annulation de l’acte de transfert de propriété qui le prive de ses droits, s’il s’agit d’une donation ou si la contre-partie assez de valeur considérablement inférieure au bien transféré. Il faut donc une situation assez de fraude éclatante.

 

La réticence des juges anglais à reconnaître un abus de la personnalité morale liée à l’interprétation stricte de la loi peut aboutir à des solutions qui peuvent choquer le sens de l’équité. Ainsi récemment, les juges ont refusé d’annuler sur la base de la section 423 de l’Insolvency Act un transfert de biens d’une société insolvable vers une société en sommeil qui ensuite repris l’exploitation de la même entreprise. Le créancier de l’ancienne société s’est retrouvé désarmé sans espoir de recouvrer sa créance[112].

 

En France, les juges sont particulièrement disposés à utiliser les outils juridiques dont ils disposent pour mettre en échec de telles manœuvres. Tout d’abord l’article 1167 du Code civil permet aux créanciers d’attaquer les actes faits par leur débiteur en fraude de leur droit. De plus les juges peuvent également se référer à l’adage « fraus omnia corrumpit » pour annuler le transfert de propriété. Si la société qui reçoit les biens a été créée dans le seul but de frauder, elle est privée d’affectio societatis et donc fictive.

 

 

B L’abus de la personnalité juridique de la société

 

La personnalité morale recèle bien d'autres atouts que l'autonomie patrimoniale par rapport aux associés et dirigeants. En tant que personne juridique à part entière elle peut être utilisée pour masquer sa réelle identité, son domicile, son passé... Il s’agit généralement d’échapper à une obligation qui peut être légale ou contractuelle(1). La fraude fiscale occupe une place particulièrement importante au sein des objectifs ainsi recherchés(2).

 

§1 La société créée pour échapper à une obligation

 

a) Pour échapper à une obligation contractuelle

Les obligations contractuelles auxquelles il s’agit le plus souvent d’échapper sont l’obligation de délivrance, la clause de non concurrence et le pacte de préférence.

 

Si le seul but de la création d'une société est d'échapper à des obligations contractuelles les juridictions anglaises la qualifient de façade ou de feinte. Dans l’arrêt Woolfson v Strathclyde Regional Council[113], la Chambre des Lords a restreint les situations dans lesquelles les juges anglais pouvaient lever le voile à ce seul cas, mais elle n’a pas défini le terme de feinte ou de façade si ce n’est par la négative. Une société est une façade si elle ne sert en réalité pas à « exploiter une affaire selon les modalités établies par ses statuts »[114]. La définition de la feinte établie par

Snook v. London and West Riding Investments Ltd[115] se rapproche de la notion française de la simulation et elle n’est évidemment pas celle à laquelle il faut se référer. L’utilisation de cette définition permettrait au juge anglais de lever le voile de la personnalité morale si une société est unipersonnelle mais donne au public l’impression d’être constituée par un groupe de personnes, comme l’était celle de Salomon. Or les juges anglais n’ont pas ce pouvoir. Toulson J. dans l'arrêt Yukong Line Ltd of Korea v. Rendsburg Investment Corporation of Liberia and Others N°2[116], affirme que les juges semblent dans ce contexte inclure dans la notion de feinte « les activités d'une société créée dans le seul but de tenter d'échapper à [des] obligations contractuelles .»[117] La notion de feinte apparaît alors réellement comme l’équivalent de la fraude française.

 

Ainsi dans l’arrêt Re Darby[118], les juges anglais ont établi que "les cours ne laisseront pas la personnalité morale être utilisée dans un but frauduleux ou comme outil permettant d'échapper à des obligations contractuelles ou toute autre obligation légale. »[119] Dans cette affaire une société avait été créée par un individu qui souhaitait ainsi cacher son passé douteux à ses futurs clients. Ce principe a de nouveau été utilisé dans Gilford Motor Co Ltd v Horne[120]. Dans cette affaire, le défendeur était engagé par une clause de non concurrence à l'égard de son ancien employeur. Il avait créé une société pour mener les activités que la clause lui interdisait. Lord Hanworth M.R. a reconnu un abus de la personnalité morale. Selon lui "la société [était] la créature du défendeur, un outil, une feinte, un masque qu'il [tenait] devant son visage pour ne pas avoir à se soumettre à l'équité. »[121]. De nouveau dans Jones v Lipman[122] un tel procédé a été jugé illégal. Le défendeur s'était engagé à vendre au demandeur un terrain. Avant l'exécution du contrat dont il cherchait désormais à se dégager, il avait transféré le terrain à une société qu'il venait d'acheter. Dans son jugement Russel J. a remarqué que « (i) que la société était sous le contrôle complet du défendeur, and (ii) que l'acquisition de la société par le défendeur et le transfert vers elle du terrain objet du contrat avec le demandeur avaient pour seul but de faire échec au droit de demandeur à l'exécution du contrat... »[123]

 

En droit français l’adage « fraus omnia corrumpit » permet aux tribunaux de s’opposer à l’utilisation de la personnalité morale afin d’échapper à une obligation. Un transfert de biens opéré dans le but d’échapper à une obligation de délivrance sera annulé[124]. Une société utilisée comme un masque par une personne lié par une clause de non-concurrence se verra également reproché son caractère frauduleux même si elle n’est pas fictive[125].

 

b) Pour échapper à une exigence légale

Droits français et anglais punissent l’utilisation de la personnalité morale de la société pour échapper à des exigences légales.

 

Dans Merchandise Transport Ltd v. British Transport Commission[126] les juges anglais ont refusé de considérer une société mère et sa filiale comme des entités séparées. Il s’agissait d’une demande d’obtention d'une licence, que la société mère n'avait pas le droit d'obtenir. De même un individu mis en banqueroute qui essaie d'obtenir un prêt en se cachant derrière une société commet un délit selon la section 360(1)(a) de l'Insolvency Act 1986[127] concernant les méfaits de l’individu mis en faillite avant et après la faillite.

 

En droit français, l'accent est mis sur l'aspect frauduleux de la manœuvre. L'expression « fraus omnia corrumpit » est utilisée par les juges pour faire échec à de telle tentative de détournement de l'utilisation de la personnalité morale des sociétés. Par exemple, dans un arrêt du 17 mars 1992 la première chambre civile de la cour de cassation a sanctionné la création d'une société dans le but de frauduleusement porter atteinte aux droits d'un héritier.[128] Est également illégale la division artificielle d’une même entreprise en plusieurs sociétés afin d’échapper aux exigences du droit du travail[129]. Ainsi que l’utilisation d’une société par un étranger dépourvu de la carte de commerçant étranger[130].

 

§2 Le cas particulier de la fraude fiscale

Les droits français et anglais prennent particulièrement soin de punir toute utilisation de la personnalité morale des sociétés dans un but de fraude fiscale. Comme l'affirme Pascal Diener[131], « le principe de la liberté des choix fiscaux directs et indirects trouve sa limite dans le caractère fictif ou frauduleux des opérations. » La fraude fiscale peut être réalisée au niveau national ou international.

 

a) La fraude fiscale internationale

La fraude fiscale internationale consiste généralement en la création d'une société-relais dans un paradis fiscal, la société en question étant contrôlée par une personne physique ou morale établie dans un autre pays.[132]

 

Le principe veut qu'une société soit assujettie aux impôts britanniques sur les sociétés si elle a été enregistrée au Royaume Uni. Certains individus enregistrent leur société dans un paradis fiscal pour ensuite la faire fonctionner au Royaume-Uni. Tout d’abord, pour contrer ce genre d'évasions fiscales l'arrêt De Beers Consolidated Mines Ltd v Howe[133] a introduit un autre critère que l'enregistrement pour déterminer si la société est assujettie aux impôts britanniques : celui de la direction centrale[134]. Ce critère a été repris par la législation et est parfois utilisé par les juges en combinaison avec la théorie du mandat.

 

La section 739 du Income And Corporation Taxes Act 1988 se fixe le but d’éviter « l’évasion par les individus ordinairement résidents au Royaume-Uni des impôts sur le revenu par des transferts de biens à la suite desquels les revenus deviennent payables à des personnes résident hors du Royaume-Uni. »[135] Cette section transforme les profits de la société située à l’étranger et utilisée à des fins de fraude en revenus personnels du fraudeur, qui réside Royaume-Uni. Ainsi, dans l’arrêt R. v Dimsey (Dermot Jeremy) (No.1)[136], le défendeur, qui résidait à Jersey, était à la tête d’une société qui créait pour ses clients des sociétés offshores. Il a été condamné sur la base de l’article 739, parce que les sociétés, bien que créées à Jersey, étaient dirigées et contrôlées par les coaccusés du Royaume-Uni. Selon l’arrêt R. v Charlton[137], pour échapper à la sanction de la section 739 il faut démontrer que « les transactions ont été effectuées sans intention malhonnête dans le cadre d’une planification fiscale légitime »[138]. Au-delà des dispositions légales les juges anglais ont également utilisé la notion de mandat pour lutter contre la fraude fiscale internationale. Les difficultés mentionnées plus haut pour établir l'existence d'un mandat entre une société et une autre personnalité juridique sont atténuées en matière de droit fiscal.

 

Deux types de situations peuvent être distingués:

 

· Le cas d'une société mère étrangère avec une filiale britannique. La théorie du mandat peut permettre au juge de considérer que la société mère est présente au Royaume Uni à travers sa filiale, comme dans Re F.G. (Films) Ltd[139] et Firestone Tyre and Rubber Co Ltd v Lewellin[140].

 

· Le cas d'une filiale étrangère d'une société britannique. Déjà dans The Gramophone and Typewriter limited v. Stanley[141], il a été établi que le seul fait que la société-mère détenait toutes les parts de sa filiale étrangère n'était pas suffisant pour imposer la société mère sur les profits réalisés par la filiale. La décision I.R.C. v Samsom[142] a permis d'affiner les critères. Il a été jugé que « si une filiale dispose de ses biens propres et fait ses propres affaires elle n'est pas le mandaté de la société mère »[143]. Une telle construction peut toutefois être révélée. Dans Unit Construction Co Ltd v Bullock[144] une société mère britannique a été considérée imposable sur les profits réalisés par les filiales kenyanes parce que le conseil d'administration les contrôlait totalement.

 

 

Face à l'utilisation de société relais dans le seul but d'échapper à l'impôt l'administration fiscale française dispose outre l’arme de l’abus de droit des articles 57 et 209 B du Code général des impôts[145].

 

L’article 57 oblige les sociétés, soit contrôlant soit contrôlées par des sociétés étrangères, à inclure dans leurs profits imposables les profits transférés aux sociétés étrangères. Si les sociétés étrangères sont situées dans un paradis fiscal le critère de contrôle n’est pas exigé.

 

L'article 209 B dispose que seront rattachés au résultat d'une société française, en proportion de sa participation dans la société-relais, les bénéfices de la société soumis à un régime fiscal privilégié si la société française détient au moins 10 % de la société relais.

 

La fraude fiscale internationale peut également prendre la forme du treaty shopping ou abus de traité. Cela consiste à simuler une opération entrant dans le champ d'un traité pour bénéficier des avantages fiscaux qu'il procure, tel l'obtention d'avoirs fiscaux ou la déduction des dépenses réalisées. C'est en réponse à de telles pratiques que le législateur a introduit l'article 238 A du Code général des impôts relatif aux prestations de services réputées fictives[146]. Cet article exige d'un débiteur soumis à l'impôt en France qui verse à un bénéficiaire établi dans un paradis fiscal, des intérêts, arrérages, redevances et autres rémunérations de services, et qui souhaite déduire la charge qui en résulte, d'établir que les dépenses correspondent à des opérations réelles et qu'elles ne présentent pas un caractère anormal ou exagéré. Cet article établit ainsi une présomption légale de fictivité et d'anormalité de l'opération dérogatoire du principe général de droit privé selon lequel une opération est présumée réelle.

 

b) La fraude fiscale interne

L'auteur français Jean Cosson distingue deux types de fraude fiscale interne : la fraude traditionnelle qui consiste en la dissimulation de revenus (défaut de déclaration, défaut de comptabilité, comptabilité occulte...) et la fraude moderne par opérations fictives[147]. C'est dans le cadre de cette dernière que sont parfois opérés des abus de la personnalité morale par l'utilisation de sociétés fictives.

 

En droit français l'article L 64 du Livre des procédures fiscales institue une procédure de répression des abus de droit à l'égard des simulateurs. Ainsi, alors qu'en droit privé la simulation est en principe légale et exceptionnellement répréhensible, en droit fiscal c'est l'inverse qui s'applique : la simulation est a priori répréhensible.

 

Selon Bernard Maubru il y a abus de la personnalité morale dans le cadre fiscal lorsque la création d'une société est motivée par le seul souci d'échapper ou de diminuer les impôts qui auraient été dus si la société n'avait pas été créée[148]. Par exemple la création d'une filiale fictive pour diminuer les impôts de la société mère a été considérée illégale[149]. Il en a été de même d’une société créée par un commerçant dans le but de diminuer ses impôts[150].

 

En droit anglais, la loi n’établit pas de principe général condamnant la fraude fiscale. C’est la jurisprudence qui a introduit l’idée qu’une transaction réalisée à des fins exclusivement fiscales et dépourvue de but commercial n’aura pas d’effets sur le plan fiscal.[151]

 

A défaut d’établir un principe général[152], la loi prête particulièrement attention aux sociétés qualifiées de fermées[153]. Elles sont considérées comme propices à la fraude fiscale et donc soumises à des dispositions adaptées. Les sections 414 à 422 du Income and Corporate Taxes Act les définissent comme étant des sociétés contrôlées directement ou non par au plus cinq associés ou par des associés qui sont également directeurs.[154].

 

Le cas des successions illustre parfaitement le fonctionnement des deux systèmes juridiques face aux fraudes fiscales internes. Ni en droit français, ni en droit anglais il n'y a de droit de succession sur les sociétés. D'où parfois la création d'une société dans le but d'opérer une succession non imposée. La section 94 du Capital Transfer Tax 1984 Act dispose qu'un transfert opéré par une société fermée peut donner lieu à une imposition similaire à celle qui aurait été levée si chaque participant avait réalisé un transfert de valeur proportionnelle à sa part dans la société. Il n'y a par contre en droit français aucune disposition spécifique à ce genre de situation. Toutefois dans la mesure où la société n'a été créée que pour réaliser ce transfert, elle est dépourvue d'affectio societatis et de plus créée dans le but de frauder aux droits d'un tiers (le trésor) et donc fictive[155]. Si un seul acte était motivé par la fraude fiscale, seul l'acte est affecté.

 

Il faut noter que les auteurs Morse et Williams considèrent que la notion de société fermée n'est désormais qu'un vestige inutile[156]. La globalisation a facilité la fraude fiscale internationale et les taux d'impositions ont diminué. Ce type de fraude serait désormais rare. Cette appréciation ne semble pas être partagée par les juridictions françaises.

 

La fiscalité anglaise avantage les personnes créant leur propre société par rapport aux salariés. En conséquence, certains sont tentés de changer artificiellement de statut. Ils créent une société avec laquelle contracte désormais leur ancien employeur pour obtenir les services de l'ancien employé. Une telle technique était considérée comme légale par la jurisprudence[157], même si cela résultait en une diminution artificielle des impôts dus. Le Finance Act 2000 y a mis fin. Le Schedule 12 dispose que les revenus générés dans de telles circonstances seront traités comme des salaires.

 

Conclusion de la 1ère partie :

Hors des dispositions législatives spécifiques, les juges anglais ne reconnaissent l’existence d’un abus de la personnalité morale que dans des situations de fraude caractérisée. Les juges français, armés non seulement de la théorie de la fraude, mais de la notion de société fictive et de la confusion de patrimoines, entretiennent une notion plus large de l’abus de la personnalité morale. Il est possible d’y voir la marque de la réticence générale du droit anglais à analyser les motifs des individus utilisant une technique légale particulière, qui s’exprime également par exemple à l’égard du mariage. Les juges français n’ont pas une telle réticence. Pour les juges anglais dans la mesure où la société est utilisée pour exploiter une entreprise il ne saurait il y avoir un abus, c’est uniquement dans les situations où seule la fraude a motivé le recours à un attribut de la forme sociale que les juges anglais réagiront. Par contre les juges français exercent un contrôle plus complet de la motivation de l’utilisation de la personnalité morale.

 

Au-delà des considérations juridiques pures, la différence entre les deux systèmes est également le reflet de deux conceptions distinctes de la vie économique. Pour refuser de qualifier d’abus un comportement choquant pourtant la morale, les juges anglais rappellent souvent au demandeur que quiconque décide de contracter avec une société le fait à ses risques et périls. Juges et législateurs français semblent plus soucieux de parvenir à une solution respectant l’équité, ce qui a conduit Nabil Fadel Raad à définir l’abus de la personalité morale comme «un comportement immoral de l’usager du droit »[158]. La portée pratique du principe de la personnalité légale de la société est ainsi affaiblie.

 

Section 2. Les conséquences de l’abus de la personnalité morale

 

La reconnaissance d'une situation d'abus de la personnalité morale aboutit à des sanctions pouvant toucher la personnalité morale et, ou les auteurs de l'abus.

 

A Conséquences relatives à la personne morale

 

Les droits anglais et français diffèrent grandement quant à l'étendue des conséquences de la reconnaissance d'un abus de la personnalité morale sur la société. Les deux systèmes juridiques admettent la possibilité de la perte de certains attributs de la personnalité morale (2), mais seul le droit français envisage dans certaines situations la disparition totale de la société(1).

 

§1 Perte totale de la personnalité morale en droit français

 

En droit français, la sanction la plus sévère de l'abus de la personnalité morale est mise en oeuvre à l'encontre des sociétés fictives et/ou frauduleuses. La nature de cette sanction est sujette à controverse parmi les auteurs, et la jurisprudence n'a semble t-il pas encore résolu le problème. Les deux théories en opposition sont celle de l'inexistence des sociétés fictives et de leur nullité.

 

Les partisans de l’inexistence s'appuient sur la formule de Demolombe : « on n'annule pas le néant » ils rappellent également l'avantage que procure l'imprescriptibilité de la déclaration d'inexistence[159]. Les partisans de la nullité voient dans l'absence d'affectio societatis une violation de l'article 1832 du Code civil dont la sanction est, selon l'article 1844-16, la nullité.

 

Un arrêt du 16 juin 1992 de la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation aurait pu mettre un terme au débat. Il a établi qu’une société fictive est nulle et non inexistante. Toutefois un obstacle majeur empêche encore la clôture du débat : l'approche ainsi consacrée contrevient à l'article 11 de la première directive européenne du 9 mars 1968, relative à la publicité, aux engagements sociaux et à la nullité des sociétés[160]. Cet article établit la liste des situations dans lesquelles une société commerciale peut être annulée. Hors cette liste n’inclut pas la fictivité. Dans l'arrêt Marleasing du 13 novembre 1990[161], la CJCE a affirmé le caractère limitatif de cette liste. Le principe de primauté du droit communautaire devrait donc gravement atteindre la portée de l'arrêt du 16 juin 1992.

 

Face à cette situation, certaines juridictions françaises ont décidé de ne pas faire application du principe de la nullité des sociétés fictives. Ainsi dans un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 16 novembre 1993 il a été affirmé que « la fictivité d'une société n'entraîne pas sa nullité, elle permet d'étendre la procédure de liquidation judiciaire à la société qui ne se distingue qu'en apparence de celle qui est déjà soumise à la procédure collective, une procédure unique s 'applique alors aux deux sociétés dont le patrimoine devient le gage commun des créanciers de ces sociétés. » Une telle approche n'est pas sans rappeler celle du droit anglais décrite plus bas. Il est difficile de présager des futurs développements du droit français en ce domaine. La réticence à une application des règles communautaires persiste[162]. Dans un arrêt du 22 juin 1999 de la chambre commerciale de la Cour de cassation [163] a réaffirmé le principe de la nullité d’une société fictive. L’affaire concernait une sûreté réelle consentie par la société fictive avant que sa fictivité ne soit déclarée. La nullité s’opérant sans rétroactivité, la sûreté a été considérée comme valide et elle a pu ainsi être opposée aux créanciers chirographaires. Cet arrêt illustre un avantage majeur de la nullité par rapport à l’inexistence : la nullité n’est pas opposable aux tiers de bonne foi (1844-16 du code civil). Toutefois, le problème de la conformité avec le droit communautaire persiste.

 

Que la société fictive soit déclarée nulle ou inexistence c’est par l’action en déclaration de simulation que la sanction pourra être prononcée. Cette action permet à « toute personne qui y a intérêt de faire établir que la situation réelle est différente de celle qui a été apparemment voulue »[164]. Les juges ont une conception large de l’intérêt. Les tiers sur lesquels la société simulée produit ses effets, le ministère public et même l’auteur de la simulation[165] peuvent exercer l’action. Suite à la déclaration de la simulation les tiers pourront, soit faire annuler la société soit, sur la base de l‘article 1321 du Code civil, se prévaloir au choix de l’acte réel ou de l’acte apparent[166].

 

L’article 42-1 du décret du 30 mai 1984 prévoit au bout de deux ans la radiation d’office par le greffier du registre du commerce des sociétés ayant cessé toute activité. La radiation n’entraîne pas immédiatement la disparition de la personnalité morale qui subsiste « aussi longtemps que les droits et obligations à caractère social ne seront pas liquidés »[167]. La question se pose alors de savoir si la cessation d’activité peut être considérée parallèlement comme une cause de dissolution. L’article 1844-7 du Code civil dispose en son alinéa 2 que « la société prend fin par la réalisation ou l'extinction de son objet ». Dans un arrêt du 17 janvier 1977, la chambre commerciale de la cour de cassation[168] a décidé que la simple cessation d’activité n’était pas une cause de dissolution de plein droit. Les juges français répugnent donc à dissoudre une société en sommeil.

 

Se pose également la question des sociétés frauduleuses mais non fictives. Les juridictions françaises tendent à les sanctionner par la nullité. Dans un arrêt du 28 janvier 1992, la chambre commerciale de la cour de cassation a affirmé que la fraude est « une cause générale de nullité des sociétés ».[169]. Une telle position n’est pas en conformité avec la première directive qui n’inclut pas dans les causes de nullité la fraude dans son article 11. Face à ce problème certains auteurs[170] prônent l’inopposabilité comme sanction de la fraude. Ils remarquent que c’est déjà la sanction de l’action paulienne instaurée par l’article 1167 du Code civil et que de plus les conséquences de l’inopposabilité de la société à l’égard des victimes de la fraude sont semblables à celles de la nullité en ce qui concerne ces victimes. L’action en déclaration de fraude peut être exercée par toute personne y ayant intérêt dans le cas d’une fraude à la loi et par celui dont l’intérêt a été lésé dans le cadre d’une fraude à un tiers. Une action paulienne ne peut être menée que pour défendre une créance existante mais l’acte frauduleux peut être antérieur à la créance. [171]

 

§2 Persistance de la personnalité morale

 

Parfois la reconnaissance d'un abus n'affecte pas la personne morale de la société dans sa totalité mais seulement certains attributs. Il en est ainsi pour tous les cas d’abus de la personnalité morale en droit anglais et pour certaines formes d’abus en droit français. La source peut être légale, comme l'article L624-5 du Code de commerce et les sections 213 et 214 de l'Insolvency Act 1986 ou jurisprudentielle.

 

a) Les Conséquences relatives à la personnalité morale d’origine jurisprudentielle

La fraude en droit anglais n’est pas sanctionnée par la disparition de la société. Le principe général quant aux conséquences d'un tel abus de la personnalité morale a été exprimé par Lord Buckmaster dans la décision Rainham Chemical Works v. Belvedere Fish Guano[172] 

 

« Si une société a été créée dans le but express d'accomplir un acte illégal ou si, une fois créée, ceux qui ont le contrôle ordonne expressément qu'un acte illégal soit accompli, les individus aussi bien que la société sont responsables des conséquences »

 

Loin de déclarer une société feinte nulle ou inexistante, les juges anglais qui ont découvert un abus de la personnalité morale confirment indirectement la personnalité juridique de la société en édictant une sanction non seulement à l'égard des auteurs de l'abus mais également à l'encontre de la société. Ce principe a été exprimé par Lord Hansworth M.R. dans Gilford Motor Co Ltd v Horne[173]. Il y a été affirmé que si une société était une feinte, un simple masque, alors il était impossible de s'opposer à ce qu'une mise en demeure soit prononcée à son égard. De même dans Jones v Lipman[174], l'exécution intégrale du contrat a été exigée à la fois du vendeur et de la société qu'il avait créée pour échapper à son obligation de délivrance. Une telle approche a été considérée contradictoire par certains, une décision de justice prise à l'encontre d'une société contredirait son statut de simple feinte[175]. Parfois seul un acte particulier impliquant la société va être annulé, ainsi dans Trustee of Gonville v. Patent Caramel Company, Limited[176] l'acte de vente d'un fonds de commerce à une société a été annulé parce que motivé par la volonté du commerçant d'échapper à ses créanciers personnels. De même dans In re Slobodinsky Ex parte Moore[177] le transfert des biens de S. qui était en faillite vers une société à responsabilité limitée afin de ne pas avoir à payer ses dettes a été déclaré inopposable aux créanciers de S.. Une telle solution est parfois adoptée en droit français quand la personne dupée choisie de ne s'attaquer qu'à l'acte et non à l'ensemble de la société. En droit anglais ne dispose pas d’un choix équivalent, il ne peut s’attaquer qu’à l’acte, cela s’avère généralement suffisant pour rétablir ses droits. Creasey v. Breachwood Motors Ltd and other[178] illustre la diversité des solutions adoptées par les juges anglais confrontés à un abus de la personnalité morale. Les juges ont ainsi décidé de substituer une société à l'égard de laquelle un jugement avait été prononcé, par une autre société. Cette dernière avait été créé pour succéder à la première dans l'exploitation de l'affaire tout en faisant échec à la mise en oeuvre du jugement prononcé contre elle grâce à l'établissement d'une personne juridique différente. L’intérêt exigé par les juges anglais pour pouvoir exercer ce type d’action est semblable à celui exigé en France. La création de la société peut être antérieure à l’obligation évitée[179] mais celle-ci doit être certaine au moment où l’action est exercée[180].

 

Comme noté plus haut, en droit français l’action en déclaration de simulation ou de fraude ne mène pas toujours à la disparition de la personnalité morale de la société mais parfois seulement en son inopposabilité à l’égard du  tiers lésé.

 

La question de la sanction de la confusion totale de patrimoines pose un problème dans la mesure où l’autonomie de la notion par rapport à la fictivité est parfois contestée[181]. Toutefois la sanction envisagée par les partisans d’une notion autonome de la condusion de patrimoines est l’extension de la liquidation et non l’anéantissement de la personnalité morale[182]. Les effets sont alors malgré tout très semblables à ceux de l’anéantissement de la personnalité morale en ce qui concerne les conséquences patrimoniales.

 

L’application de la théorie de l’apparence n’a pas non plus de conséquences radicales sur la personnalité morale de la société considérée. L’approche des juges français rappelle sur ce point la flexibilité anglaise. Les mesures prises sont spécifiques à l’espèce. Dans le cas des single-ship companies cela mène à la saisie conservatoire des navires appartenant à un même propriétaire sous le couvert de sociétés différentes[183]. Dans d’autres affaires, le groupe de sociétés peut devenir solidairement responsable de l’inexécution d’un contrat passé par l’une d’entre elles[184].

 

b) Les conséquences relatives à la personnalité morale d’origine légale

Dans la mesure où la pratique jurisprudentielle française qui consiste à déclarer nulles les sociétés fictives et les sociétés frauduleuse se fait praeter legem et même à l’encontre du droit communautaire, aucune loi française ne dispose qu’un abus de la personnalité morale sera sanctionné par sa disparition. Il en est de même du droit anglais

 

Aussi bien en droit anglais qu’en droit français les sanctions légales sont de nature patrimoniale, la limitation de la responsabilité cesse de protéger les auteurs de l’abus.

 

B Les conséquences relatives aux auteurs de l'abus de personnalité morale

 

L’abus de la personnalité peut avoir des conséquences civiles. Les abus les plus graves appellent également des sanctions pénales.

 

§1 Conséquences civiles

 

Certaines forme d’abus ne pouvant être sanctionné qu’à la liquidation de la société, c’est le droit des procédures collectives qui a la fonction de les sanctionner. Droit commun et droit fiscal interviennent par contre à l’égard de l’ensemble des abus.

 

a) Conséquences de droit commun et conséquences fiscales

 

- Conséquences issues du droit commun

Quand l’abus réside dans la fictivité de la société ou le motif frauduleux, les victimes disposent en France de plusieurs formes de recours : l’action en déclaration de simulation, l’action paulienne et l’action en responsabilité civile.

 

A l’issu de l’action en déclaration de simulation, les tiers peuvent au choix se prévaloir soit de l’acte secret soit de l’acte apparent. S’ils le désirent la création de la société ne produit donc plus effet à leur égard.

 

L’article 1167 du Code civil introduit l’action paulienne qui permet aux créanciers d’attaquer les actes commis en fraude leur droits. L’acte devient inopposable aux victimes de l’abus. Cela permet donc une solution qui remet les parties en l’état dans lequel elles se trouvaient avant l’abus de la personnalité morale.

 

L’action en responsabilité civile permet aux victimes de l’abus de voir le préjudice subit réparé. L’article 1844-17 du Code civil réglemente l’action en responsabilité fondée sur l’annulation de la société. Du fait du caractère ambigu de la nature des conséquences de la fictivité ou de la fraude sur la société, il convient sûrement d’exclure l’utilisation de cet article dans les situations d’abus de la personnalité morale[185]. Il faut donc s’orienter vers l’action de droit commun établie par l’article 1382 du Code civil. La volonté illicite des auteurs de l’abus constitue alors la faute. Par exemple, la constitution d’une société pour commettre des actes de concurrence déloyale engage la responsabilité civile des auteurs[186].

 

L’article 52 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales permet aux tiers et aux associés victimes d’une faute commise par le dirigeant pendant son mandat d’engager une action en responsabilité. Sont couvertes par cet article aussi bien les infractions que les fautes de gestion.

 

A défaut de dispositions spécifiques, les juges anglais réagissent aux demandes des victimes de l’abus en cherchant à rétablir les droits que la fraude a atteint. Le fait d'avoir établit qu'une société n'est qu'une feinte permet aux juges de déclarer certains individus personnellement responsables des dettes de la société à l'égard du demandeur. Dans l’affaire Re Cyona Distributors Ltd[187], il a été décidé « l'argent devient partie intégrale du patrimoine de la société disponible pour tous les créanciers : la personnalité légale de la société est parfaitement respectée[188]. Quand la société a été utilisée pour contourner une clause de non-concurrence, une injonction est délivrée à l’encontre de la société lui ordonnant de la respecter[189].

 

En droit anglais, l’action en responsabilité que les victimes d’un abus de la personnalité morale peuvent exercer est la « conspiracy ». Toutefois, les éléments exigés sont très difficile à établir puisqu’il faut prouver que l’auteur de l’acte dommageable a précisément cherché à faire du tort à sa victime et non à toute une classe d’individus tels que l’ensemble des créanciers. Cette action est donc beaucoup moins efficace que l’action française.

 

- Conséquences issues du droit fiscal

Les mesures de nature fiscale visent en droits anglais et français essentiellement à rétablir dans l’assiette de l’impôt les sommes qui en ont été exclues suite à l’abus. Dans le cas de l’évasion fiscale internationale, les articles 57 et 209 B du Code général des impôts prévoient que les profits seront imposables en France.

 

L’article L64 du Livre des procédures fiscales sur l’abus de droit déclare inopposables les actes passés afin de masquer à l’administration la véritable nature d’une opération.

 

Si l’abus de la personnalité morale est l’œuvre d’une S.A.R.L., l'article L 267 du Livre des procédures fiscales rend, en cas de manœuvre frauduleuse ou d'inobservations répétées de diverses obligations fiscales, le ou les gérants majoritaires de la S.A.R.L. solidairement responsables du paiement des impositions et pénalités.[190]

 

La jurisprudence anglaise prévoit elle aussi l’inefficacité à l’égard de l’administration fiscale des manœuvres frauduleuses et le rétablissement dans l’assiette de l’impôt des profits qui en avaient été exclus. Dans l’arrêt IRC v Duke of Westminster[191] a été établi le principe selon lequel le juge doit respecter la situation légale créée par les parties. Toutefois, deux limites permettent à l’administration fiscale de lutter contre la fraude fiscale. Tout d’abord, les juges ne sont pas liés par les qualifications des parties. Ainsi les juges peuvent constater qu’une affaire est exploitée par une personne qui masque en réalité un autre individu, ce dernier supportera alors l’impôt[192]. De plus, le tribunal n’est pas tenu de respecter les transactions feintes. Dans Furniss v. Dawson[193] une société avait été créée à seule fin de ne pas être redevable de l’impôt sur les plus-values réalisées suite à la vente d’actions. L’administration fiscale a pu ignorer le mécanisme frauduleux pour imposer directement la vente d’actions.

 

b) Conséquences issues du droit de la procédure collective

L’abus de la personnalité morale apparue au cours de la vie de la société est sanctionné à la fois en droit anglais et en droit français à la liquidation de la société. La conséquence que la loi y attache vise essentiellement à réparer le dommage qui en est résulté.

 

Les sections 212 à 214 de l’Insolvency Act disposent que les individus auteurs des formes d’abus décrites pourront être contraints par le tribunal à verser la somme jugée appropriée à la société. Le Company Directors Disqualification Act 1986 permet d’ajouter à cette sanction une interdiction d’exercer à nouveau cette fonction si le directeur est jugé inapte à être impliqué de nouveau dans la direction d’une société[194]. C’est un pouvoir dont les tribunaux font de plus en plus usage[195].

 

Alors que le « fraudulent trading » et le « wrongful trading » ne peuvent être invoqués que par le liquidateur, l'action prévue par la section 212 traitant des « gérants délinquants » peut être exercée par le liquidateur ou tout créancier. Cette section est donc la seule véritable arme des tiers victimes d’un abus et elle mérite d’être étudiée plus en détail. Elle est la base légale d’une demande croissante provenants des créanciers. Ceux-ci exigent des directeurs ayant abusé du privilège de la responsabilité limitée[196] une réparation du préjudice subi. Selon la décision Brady & Avon v. Brady[197] lorsqu’une société est insolvable les intérêts de la société comprennent ceux des créanciers, en conséquence la violation des obligations du directeur à l’égard de la société sanctionnée par cette section devient la violation des intérêts des créanciers. Toutefois l’arrêt Yukong Line Ltd v. Rendsburg Investments[198] a établi que la section 212 ne permettait pas au créancier individuel d’exercer un recours direct pour protéger ses intérêts. Le résultat de l’action 212 est de renflouer le patrimoine de la société et donc le créancier qui est à l’origine de l’action se trouvera en concurrence avec les autres créanciers une fois l’argent versé à la société.

 

Précédemment, l’action de la section 213 de l’Insolvency Act 1986 était ouverte à tout créancier et le gérant fautif devenait solidairement responsable de toutes les dettes de la société. Désormais le tribunal lui doit ordonner de payer à la société une somme précise[199]. La section 10 du Company Directors Disqualification Act 1986 permet d’ajouter aux sanctions patrimoniales une interdiction de 2 ans à 15 ans d’exercer la fonction de directeur.

 

Les sanctions prévues par les sections 212 à 214 de l’Insolvency Act 1986 sont à but exclusivement compensatoire, la cour doit donc évaluer le coût du comportement du gérant[200]. Dans la décision Re Produce Marketing Consortium Ltd (1989) [201] il a été établi que la somme doit correspondre à une estimation du montant duquel les biens de la société ont diminué du fait de l’acte. Certains auteurs avancent que le tribunal dispose d’un certain pouvoir discrétionnaire qui lui permet de tenir compte du degré de culpabilité du directeur, mais cela n’a pas à ce jour été mis en application par les juges qui hésitent toujours quant à la réalité d’un tel pouvoir[202]. La somme versée par le directeur est tenue en trust par le liquidateur pour les créanciers chirographaires. L’action a un délai de prescription de six ans à partir du début de la procédure de liquidation de la société[203].

 

La section 217 de l'Insolvency Act 1986 rend le gérant de droit ou de fait responsable des dettes contractées par une société phœnix, c’est à dire une société utilisant un nom similaire à celui d'une société mise en liquidation judiciaire il y a moins de douze mois. La section 24 du Companies Act relative aux sociétés ayant moins de deux associés rend responsable le membre restant des dettes de la société similairement à l'article 1844-5 du Code civil.

 

Puisqu’en droit anglais le voile de la personnalité morale est rarement soulevé pour atteindre le gérant et le rendre responsable des dettes de la société les banques et autres créanciers important tendent à demander des sûretés personnelles au gérant[204] (par exemple Centros Ltd. v. Erhvervs- og Selskabsstyrelsen[205] où un gérant de deux sociétés en faillite était accusé d’avoir fait œuvre illégale de préférence à l’égard de la société pour laquelle il s’était porté caution).

 

En France la sanction légale la plus courante est inconnue du droit anglais il s’agit de l'extension de faillite. Elle est prévue par les articles L624-1 et L624-5 du Code de commerce.

 

L'article L624-1 permet notamment d'étendre la faillite en cas de confusion totale de patrimoines. Cet article dispose que « le jugement qui ouvre le redressement ou la liquidation judiciaire de la personne morale produit ses effets à l'égard de toutes les personnes membres ou associées de la personne morale et indéfiniment et solidairement responsables du passif social. Or selon un arrêt de la cour d'appel de Versailles du 16 décembre 1987[206], cela inclut les situations de confusion de patrimoines, dans lesquelles les sociétés perdent leur spécificité pour se fondre en une entreprise unique. L'extension de faillite est également la sanction prononcée dans les hypothèses énumérées dans l'article L624-5. Comme Nabil Fadel Raad le note la conséquence en est que « le dirigeant à qui on applique la mesure de cet article, supporte le passif social de la personnalité morale. Ainsi, il y a constitution de deux masses de créanciers : la masse des créanciers sociaux qui ont pour gage général le patrimoine social de la personne morale, et la masse des créanciers du dirigeant qui est constituée des créanciers sociaux et personnels de ce dernier. Ceux-ci subiront, dès le concours de ceux-là»[207]. Le directeur peut devenir responsable de la totalité des dettes de la société qu’il en soit totalement responsable ou non. La sanction peut donc sembler parfois disproportionnée. Cela est atténue par le fait qu’il peut exercer une action contre ceux y ayant également contribué, à l’exception des autres directeurs[208].

 

L’article L624-3 prévoit une sanction connue du droit anglais puisqu’il rend le dirigeant solidairement responsable de tout ou une partie des dettes de la société. L’action en comblement de passif peut être exercée dans les trois ans suivant le jugement prononçant la liquidation. Cet article peut être en concurrence avec L624-5, dans ce cas le spécifique l’emporte sur le général et donc L624-5 s’applique. Selon le professeur Terré[209] les statistiques montrent que l’action en comblement de passif est principalement utilisée suite à un manque de diligence ou au défaut d’activité ou à une poursuite abusive de l’exploitation. Il semble donc que l’abus de la personnalité morale, en tant que mauvaise utilisation volontaire de la personnalité morale[210], soit rarement l’objet de l’application de cet article qui est plutôt utilisé pour des fautes les moins graves.

 

Ces trois actions sont ouvertes à l’administrateur, au représentant des créanciers, au commissaire de l’exécution du plan, le liquidateur et au procureur de la République. Le tribunal peut également se saisir d’office.[211] En droit français, le créancier individuel ne peut pas non plus se prévaloir de ces actions[212]. Toutefois l'article L622-32 du Code de commerce permet aux créanciers dont les droits ont été fraudés de retrouver le droit de poursuite individuelle à l'égard du dirigeant d'une personne morale déclarée en état de cessation de paiements lors de la clôture de liquidation judiciaire. Les créanciers bénéficient donc d’une protection particulière.

 

Une sanction personnelle peut s’ajouter à la réparation des dommages causés à la société et à ses créanciers. L’article L625-3 du Code de commerce permet au liquidateur de demander le prononcer de la faillite personnelle du directeur fautif. De plus, l'article L625-8 du Code de commerce permet au juge de substituer à la faillite personnelle prononcée une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale.

 

Le législateur français a mis en place un dispositif par lequel les individus coupables d’un abus de la personnalité morale au cours de la vie de la société sont très sévèrement punis. La loi de 1985 a introduit avec son article 169 (désormais L622-32 du Code de commerce) le principe de la deuxième chance accordée au gérant d’une société mise en faillite, en réaction il semble que les condamnations des gérants s’étant mal comportés sont devenues plus nombreuses et plus sévères[213]. Sans doute pour s’assurer d’un équilibre entre les intérêts des créanciers et des gérants.

 

§2 Responsabilité pénale

 

L'abus de la personnalité morale n'est une infraction en soit ni en droit anglais ni en droit français. Il peut toutefois dans certains circonstances mériter une sanction pénale. Tout d’abord il faut remarquer que certaines infractions peuvent être commises par le moyen d’un abus de la personnalité morale Ensuite, il apparaît que certaines formes spécifiques d’abus sont directement sanctionnées par le droit pénal.

 

a) Droit pénal général

Tout d'abord, dans le droit anglais comme dans le droit français une sanction pénale peut intervenir dans la mesure où l'abus de la personnalité morale est utilisé pour réaliser une infraction.

 

Ainsi une escroquerie au sens de l’article 313-1 N.C.P. peut être commise par l’utilisation d’une société fictive donnant par exemple l’illusion à la victime de l’existence de fonds qui l’incitera à accorder un crédit. L’escroquerie est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 2 500 000 F d'amende et figure " au nombre des délits limitativement énumérés par l’art. 6 du décret du 8 août 1935 " emportant l’interdiction de gérer une société. L’ancien article 405 du Code pénal visait spécifiquement les fausses entreprises, mais comme le remarque Nabil Fadel Raad la nature de l’entreprise n’était qu’accessoirement prise en compte[214] il ne s’agissait donc pas d’une sanction de l’abus de la personnalité morale en soit. La corruption peut être également mise en œuvre par des fausses factures émises par des sociétés fictives.

 

L’article 314-7 du NCP sanctionne l’organisation frauduleuse de l'insolvabilité de l'entreprise. Elle est définie comme l’organisation ou l’aggravation de l’insolvabilité « en vue de se soustraire à l’exécution d’une condamnation de nature patrimoniale prononcée par une juridiction répressive ». Elle est punie de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 F d'amende. Ainsi les abus de la responsabilité limités par des transferts frauduleux de biens peuvent être pénalement sanctionnés.

 

En droit anglais l’affaire R. v Kazmi(Sabir Hussain)[215] illustre les infractions qui peuvent être commises dans le cadre d’un abus de la personnalité morale. L’unique gérant d’une société a été condamné pour tentative d‘échapper à une obligation par tromperie, escroquerie, vol et « fraudulent trading ». Il avait passé des commandes alors que sa société connaissait déjà de graves difficultés financières et qu’il savait pertinemment qu’il ne pourrait pas payer. Il avait également opéré un transfert d’argent entre la société et une société de personnes dans laquelle il avait des intérêts. Le coupable a été condamné à quatre ans de prison, et une interdiction de cinq ans de diriger une société.

 

R. v Edwards (Anthony Glen)[216] est un cas d’escroquerie opérée par l’utilisation abusive de la responsabilité limitée d’une société. Des biens étaient achetés à crédit puis revendus à faible prix juste avant que la société ne soit dissoute. En droit anglais l’escroquerie est sanctionnée par la section 15 du Theft Act 1968 qui traite de l’obtention d’un bien par la tromperie par un maximum de dix ans de prison. Selon Leigh[217], c’est la fraude la plus communément commise par le truchement d’une société. LE même auteur ne manque par d’observer que l’existence de nombreuses sociétés dormantes en Angleterre facilite cette infraction puisque ces sociétés peuvent être acquises facilement à faible prix par l’individu malhonnête.

 

Il n’existe pas en droit anglais, contrairement au droit français, de notion autonome d’abus de biens sociaux. Des faits qui auraient été caractérisés en tant que tels en droit français ont été qualifiés de vol dans l’arrêt Re Gomez[218]. Les juges ont étendu la notion de vol définie par la section 1(1) du Theft Act 1968 et y ont intégré les situations où la victime avait originellement consenti à la remise. Ce qui n’a pas manqué d’étonner les auteurs y voyant un empiètement sur la section 15 du Theft Act 1968[219]. Mais Lord Browne-Wilkinson a justifié cette décision par le besoin de mettre fin au pillage des sociétés par ceux qui les contrôle. Avant cet arrêt, il était difficile d’obtenir la condamnation d’un gérant associé unique pour abus de biens sociaux. Le principe est que l’intérêt de la société est identifiable à ceux des ses associés, sont exclus les intérêts des employés et créanciers. Si un gérant s’empare des biens de sa société celle-ci  a nécessairement consenti au transfert de propriété et il ne s’agit pas d’un vol[220]. Dans l’arrêt Gomez les juges ont affirmé que le membre unique d’une société peut être coupable de vol à l’égard de celle-ci suivant le principe déjà établit par l’arrêt R v Phillipou[221]. En ce domaine, droits anglais et français se sont donc récemment rejoints.

 

b) Droit pénal spécifique

Droits anglais et français prévoient également des infractions spécifiques à certains abus de la personnalité morale.

 

Ainsi le « fraudulent trading » de la section 213 de l'Insolvency Act 1986 est accompagné d'une sanction pénale introduite par la section 458 du Companies Act 1985. Cet article a une portée plus importante que sa correspondance civile puisque la sanction pénale peut intervenir que la société ait été liquidée ou non. De plus la section 216 de l'Insolvency Act 1986 rend pénalement responsable le gérant de droit ou de fait d'une société phœnix utilisant le nom d’une société récemment dissoute.

 

Le droit français prévoit de nombreuses sanctions pénales spécifiques. Les plus connus sont l’abus de biens sociaux et la banqueroute.

 

Le délit d’abus de biens sociaux est la qualification pénale d’une forme de confusion de patrimoines dans laquelle l’auteur à utiliser des biens de la société à l’encontre des intérêts de la société et pour son intérêt propre. Ce délit ne concerne que les sociétés de capitaux. Selon Patrick Tardivy[222], la matérialité de l’acte peut en elle-même révéler son caractère contraire à l’intérêt social. La confusion des patrimoines social et personnel est en soi une utilisation manifestement abusive des biens de la société dans la mesure où elle est personnelle. Les peines prévues sont une amende et/ou un emprisonnement et éventuellement l’interdiction d’entreprendre une profession industrielle ou commerciale. De plus, une personne condamnée pour un abus de biens sociaux ne peut plus " être membre d’un conseil d’administration ou d’un conseil de surveillance d’un établissement de crédit, ni, directement ou par personne interposée, administrer, diriger ou gérer à un titre quelconque, un établissement de crédit, ni disposer du pouvoir de signer pour le compte d’un tel établissement " aux termes de l’art. 13 de la loi du 24 janvier 1984.

 

Le recours à une société fictive peut relever du délit de banqueroute défini par les articles L626-1 à L626-7 du Code de commerce. Les abus de la personnalité morale de la société sont principalement visés par l’interdiction de dissimuler ou de détourner tout ou partie de l’actif du débiteur. Le dirigeant est alors puni de cinq ans d'emprisonnement et de 700 000 F d'amende. Ce délit couvre aussi bien les situations dans lesquelles un dirigeant transfère les biens d’une société au bord de la faillite vers une autre société que les cas de spoliation des biens de la société. Alors que le délit de banqueroute ne peut être caractérisé qu’à la fin de la vie de la société un abus de biens sociaux peut également apparaître au cours de la vie de la société. A l’occasion de l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, le délit de banqueroute entre en conflit de qualification avec l’abus de biens sociaux. Le principe de préférence pour la qualification spéciale aboutit à une solution en faveur de la banqueroute[223].

 

En droit anglais l’Insolvency Act criminalise nombre de comportements dans le cadre d’une liquidation. La section 206 sanctionne la dissimulation et le transfert frauduleux de biens appartenant à la société dans les 12 mois précédents la liquidation. De même que pour le délit de banqueroute l’infraction peut être commise par tout individu et non seulement les dirigeants de la société.

 

De plus, Christine Cutajar-Rivière[224] note l'existence en droit français d'autres qualifications pénales relatives aux sociétés pouvant faire intervenir un abus de personnalité morale. Ce sont les souscriptions frauduleuses qui consistent en l'utilisation d'une société fictive pour obtenir des souscriptions ou des versements, l'établissement mensonger du certificat des souscriptions, versements par la référence à des souscriptions fictives et la fraude fiscale.

 

L’utilisation de la personnalité morale d’une société à des fins de fraude fiscale n’entraîne pas que des sanctions civiles, elle peut également correspondre à une infraction. En droit français, l’article 1741 du CGI donne une définition générale du délit de fraude fiscale dont l’abus de la personnalité peut constituer un élément. Par exemple un promoteur immobilier utilisant des sociétés civiles immobilières fictives pour bénéficier d’un régime fiscal auquel il n’avait pas droit[225] a été jugé coupable de fraude fiscale. Le délit simple de fraude fiscale est passible, indépendamment des sanctions fiscales, d'une amende de 250 000 F et d'un emprisonnement de 5 ans ; en cas de récidive, l'amende est portée jusqu'à 700 000 F et l'emprisonnement encouru est de 10 ans[226]. Selon ces deux articles il y a soustraction coupable par soit l'omission de la déclaration, soit la dissimulation d'une part des sommes sujettes à l'impôt (ce qui sera le cas la plus courant pour un abus de la personnalité morale) et il y a délit soit par omission d'éléments dans les écritures, soit par l'entremise d'un tiers (une société fictive par exemple).

 

En Angleterre, l’administration fiscale dispose de deux procédures pour voir déclarée une sanction contre le contribuable ayant commis une fraude. Il existe une procédure qui permet de voir le fraudeur condamner à payer une pénalité. La High Court est alors compétente pour déterminer s’il y a ou non fraude et fixer le montant de la pénalité. Cette procédure est plus simple que la procédure pénale en matière de preuve et elle est donc préférée par l’administration anglaise. La pénalité ne peut pas être d’un montant supérieur à la somme due au Inland Revenue. Une action pénale est toutefois parfois exercée, souvent par souci d’exemplarité. La section 32(1) du Theft Act 1968 définit l’infraction de fraude fiscale de façon large et sans spécifier d’amende maximale. La création d’une société feinte à des seules fins fiscale entre sans aucun doute dans les comportements punis. Dans l’affaire R. v. Dimsey[227] une société offshore avait été utilisée afin de délocaliser artificiellement des profits hors du Royaume-Uni. La cour d’appel a décidé qu’un individu contrôlant de fait une société et qui organisait son entreprise de façon à ce qu’elle fasse des bénéfices et qu’il ne les déclare pas était coupable de fraude fiscale.

 

Il semble donc qu’en ce domaine le législateur anglais ait adopté une approche qu’il ne le caractérise pourtant pas et le rapproche du législateur français, à savoir l’introduction d’une disposition couvrant une grande diversité de comportements et laissant aux juges un fort pouvoir de sanction. Cette méthode peu familière courant dans le droit anglais a, sans surprise, suscité les attaques des auteurs et professionnels du droit[228].

 

La spécificité des conséquences pénales d’un abus de la personnalité morale ne se révèle pas exclusivement dans les infractions mais également dans les sanctions prononcées. Juges français et anglais ont le pouvoir dans le cadre d’une procédure pénale de sanctionner le dirigeant par une interdiction d’exercer à nouveau la fonction de dirigeant de société. En France, le non-respect par le dirigeant de l’interdiction prononcée à son égard peut conduire à un emprisonnement de six mois et/ou amende de 10 000 F à 20 000 F. En droit anglais, le Company Director Disqualification Act 1986 permet également le prononcer de ce type d’interdiction aussi bien au pénal qu’au civil.

 

 

Conclusion de la 2ème partie :

 

La différence majeure qui existe entre le droit français et le droit anglais en ce qui concerne les conséquences de l’abus de la personnalité morale est la possibilité offerte aux juges français de faire disparaître la société abusivement utilisée. Les auteurs de l’abus sont par contre sanctionnés de manière très similaire dans les deux systèmes juridiques. Les sanctions civiles ayant pour but de réparer le dommage subi et les sanctions pénales n’intervenant que pour les abus les plus graves.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Conclusion :

 

Le droit français se distingue du droit anglais par un contrôle plus rigoureux du motif de recours à la forme sociale principalement à travers la notion de société fictive. Cette dernière est de plus l’objet de la sanction la plus sévère de l’abus de la personnalité morale : la disparition de la société. Droits français et anglais s’accordent par contre pour sanctionner civilement et parfois pénalement l’utilisation de la forme sociale à des fins de fraude et le non respect de la personnalité séparée de la société à l’égard des membres. L’abus de la personnalité morale revèle donc une différence fondamentale entre le droit anglais et le droit français des sociétés ; le formalisme du premier et le réalisme du dernier. Cette caractéristique s’exprime par ailleurs dans d’autres aspects du droit tels que la formation des sociétés.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ANNEXE A : Législation française

 

CODE DE COMMERCE

 

Article L624-3

 

Lorsque le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que les dettes de la personne morale seront supportées, en tout ou en partie, avec ou sans solidarité, par tous les dirigeants de droit ou de fait, rémunérés ou non, ou par certains d'entre eux.

L'action se prescrit par trois ans à compter du jugement qui arrête le plan de redressement ou, à défaut, du jugement qui prononce la liquidation judiciaire.

Les sommes versées par les dirigeants en application de l'alinéa 1er entrent dans le patrimoine du débiteur et sont affectées en cas de continuation de l'entreprise selon les modalités prévues par le plan d'apurement du passif. En cas de cession ou de liquidation, ces sommes sont réparties entre tous les créanciers au marc le franc.

 

 

Article L624-5

 

 

   I. - En cas de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire d'une personne morale, le tribunal peut ouvrir une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire à l'égard de tout dirigeant de droit ou de fait, rémunéré ou non, contre lequel peut être relevé un des faits ci-après :

   1° Avoir disposé des biens de la personne morale comme des siens propres ;

   2° Sous le couvert de la personne morale masquant ses agissements, avoir fait des actes de commerce dans un intérêt personnel ;

   3° Avoir fait des biens ou du crédit de la personne morale un usage contraire à l'intérêt de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement ;

   4° Avoir poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements de la personne morale ;

   5° Avoir tenu une comptabilité fictive ou fait disparaître des documents comptables de la personne morale ou s'être abstenu de tenir toute comptabilité conforme aux règles légales ;

   6° Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif ou frauduleusement augmenté le passif de la personne morale ;

   7° Avoir tenu une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions légales.

   II. - En cas de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire prononcé en application du présent article, le passif comprend, outre le passif personnel, celui de la personne morale.

   III. - La date de la cessation des paiements est celle fixée par le jugement d'ouverture du redressement judiciaire ou de la liquidation judiciaire de la personne morale.

   IV. - L'action se prescrit par trois ans à compter du jugement qui arrête le plan de redressement de l'entreprise ou, à défaut, du jugement qui prononce la liquidation judiciaire.

 

 

CODE GENERAL DES IMPÔTS

 

Article 57 du Code Général des impôts(

 

1981 date d'entrée en vigueur 1er janvier 1982)

(Loi n° 96-314 du 12 avril 1996 art. 39 II, V Journal Officiel du 13 avril 1996)

 

   Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités. Il est procédé de même à l'égard des entreprises qui sont sous la dépendance d'une entreprise ou d'un groupe possédant également le contrôle d'entreprises situées hors de France.

   La condition de dépendance ou de contrôle n'est pas exigée lorsque le transfert s'effectue avec des entreprises établies dans un Etat étranger ou dans un territoire situé hors de France dont le régime fiscal est privilégié au sens du deuxième alinéa de l'article 238 A.

   ((En cas de défaut de réponse à la demande faite en application de l'article L. 13 B du livre des procédures fiscales, les bases d'imposition concernées par la demande sont évaluées par l'administration à partir des éléments dont elle dispose et en suivant la procédure contradictoire définie aux articles L. 57 à L. 61 du même livre)) (M).

   A défaut d'éléments précis pour opérer les redressements prévus aux premier, deuxième et troisième alinéas, les produits imposables sont déterminés par comparaison avec ceux des entreprises similaires exploitées normalement.

   (M) Modification de la loi 96-314. Dispositions applicables aux contrôles engagés à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi.

 

 

LIVRE DES PROCEDURES FISCALES (Partie Législative)

 

Article L267

 

Lorsqu'un dirigeant d'une société, d'une personne morale ou de tout autre groupement, est responsable des manoeuvres frauduleuses ou de l'inobservation grave et répétée des obligations fiscales qui ont rendu impossible le recouvrement des impositions et des pénalités dues par la société, la personne morale ou le groupement, ce dirigeant peut, s'il n'est pas déjà tenu au paiement des dettes sociales en application d'une autre disposition, être déclaré solidairement responsable du paiement de ces impositions et pénalités par le président du tribunal de grande instance, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article L. 266. Cette disposition est applicable à toute personne exerçant en droit ou en fait, directement ou indirectement, la direction effective de la société, de la personne morale ou du groupement.

 

ANNEXE B : Législation anglaise

 

INSOLVENCY ACT 1986

 

s 212 Summary remedy against delinquent directors, liquidators, etc.

 

(1) This section applies if in the course of the winding up of a company it appears that a person who--

(a) is or has been an officer of the company,

(b) has acted as liquidator, administrator or administrative receiver of the company, or

(c) not being a person falling within paragraph (a) or (b), is or has been concerned, or has taken part, in the promotion, formation or management of the company,

has misapplied or retained, or become accountable for, any money or other property of the company, or been guilty of any misfeasance or breach of any fiduciary or other duty in relation to the company.

(2) The reference in subsection (1) to any misfeasance or breach of any fiduciary or other duty in relation to the company includes, in the case of a person who has acted as liquidator or administrator of the company, any misfeasance or breach of any fiduciary or other duty in connection with the carrying out of his functions as liquidator or administrator of the company.

(3) The court may, on the application of the official receiver or the liquidator, or of any creditor or contributory, examine into the conduct of the person falling within subsection (1) and compel him--

(a) to repay, restore or account for the money or property or any part of it, with interest at such rate as the court thinks just, or

(b) to contribute such sum to the company's assets by way of compensation in respect of the misfeasance or breach of fiduciary or other duty as the court thinks just.

(4) The power to make an application under subsection (3) in relation to a person who has acted as liquidator or administrator of the company is not exercisable, except with the leave of the court, after that person has had his release.

(5) The power of a contributory to make an application under subsection (3) is not exercisable except with the leave of the court, but is exercisable notwithstanding that he will not benefit from any order the court may make on the application.

 

s 213 Fraudulent trading.

 

(1) If in the course of the winding up of a company it appears that any business of the company has been carried on with intent to defraud creditors of the company or creditors of any other person, or for any fraudulent purpose, the following has effect.

(2) The court, on the application of the liquidator may declare that any persons who were knowingly parties to the carrying on of the business in the manner above-mentioned are to be liable to make such contributions (if any) to the company's assets as the court thinks proper.

 

s 214 Wrongful trading.

 

(1) Subject to subsection (3) below, if in the course of the winding up of a company it appears that subsection (2) of this section applies in relation to a person who is or has been a director of the company, the court, on the application of the liquidator, may declare that that person is to be liable to make such contribution (if any) to the company's assets as the court thinks proper.

(2) This subsection applies in relation to a person if--

(a) the company has gone into insolvent liquidation,

(b) at some time before the commencement of the winding up of the company, that person knew or ought to have concluded that there was no reasonable prospect that the company would avoid going into insolvent liquidation, and

(c) that person was a director of the company at that time;

but the court shall not make a declaration under this section in any case where the time mentioned in paragraph (b) above was before 28th April 1986.

(3) The court shall not make a declaration under this section with respect to any person if it is satisfied that after the condition specified in subsection (2)(b) was first satisfied in relation to him that person took every step with a view to minimising the potential loss to the company's creditors as (assuming him to have known that there was no reasonable prospect that the company would avoid going into insolvent liquidation) he ought to have taken.

(4) For the purposes of subsections (2) and (3), the facts which a director of a company ought to know or ascertain, the conclusions which he ought to reach and the steps which he ought to take are those which would be known or ascertained, or reached or taken, by a reasonably diligent person having both--

(a) the general knowledge, skill and experience that may reasonably be expected of a person carrying out the same functions as are carried out by that director in relation to the company, and

(b) the general knowledge, skill and experience that that director has.

(5) The reference in subsection (4) to the functions carried out in relation to a company by a director of the company includes any functions which he does not carry out but which have been entrusted to him.

(6) For the purposes of this section a company goes into insolvent liquidation if it goes into liquidation at a time when its assets are insufficient for the payment of its debts and other liabilities and the expenses of the winding up.

(7) In this section "director" includes a shadow director.

(8) This section is without prejudice to section 213.

 

 

INCOME AND CORPORATION TAXES ACT 1988 CHAPTER 1

PART XVII TAX AVOIDANCE

CHAPTER III TRANSFER OF ASSETS ABROAD

 

s 739 Prevention of avoidance of income tax.

Marginal Notes:

1) Income and Corporation Taxes Act 1970 (c.10), s.478(1), (2), (2A), (2B); Finance Act 1981 (c.35), s.46(3), (4)

 (1) Subject to section 747(4)(b), the following provisions of this section shall have effect for the purpose of preventing the avoiding by individuals ordinarily resident in the United Kingdom of liability to income tax by means of transfers of assets by virtue or in consequence of which, either alone or in conjunction with associated operations, income becomes payable to persons resident or domiciled outside the United Kingdom.

 [(1A) Nothing in subsection (1) above shall be taken to imply that the provisions of subsections (2) and (3) below apply only if--

 (a) the individual in question was ordinarily resident in the United Kingdom at the time when the transfer was made; or

 (b) the avoiding of liability to income tax is the purpose, or one of the purposes, for which the transfer was effected.]

 (2) Where by virtue or in consequence of any such transfer, either alone or in conjunction with associated operations, such an individual has, within the meaning of this section, power to enjoy, whether forthwith or in the future, any income of a person resident or domiciled outside the United Kingdom which, if it were income of that individual received by him in the United Kingdom, would be chargeable to income tax by deduction or otherwise, that income shall, whether it would or would not have been chargeable to income tax apart from the provisions of this section, be deemed to be income of that individual for all purposes of the Income Tax Acts.

 (3) Where, whether before or after any such transfer, such an individual receives or is entitled to receive any capital sum the payment of which is in any way connected with the transfer or any associated operation, any income which, by virtue or in consequence of the transfer, either alone or in conjunction with associated operations, has become the income of a person resident or domiciled outside the United Kingdom shall, whether it would or would not have been chargeable to income tax apart from the provisions of this section, be deemed to be income of that individual for all purposes of the Income Tax Acts.

 (4) In subsection (3) above &quotcapital sum" means, subject to subsection (5) below--

 (a) any sum paid or payable by way of loan or repayment of a loan, and

 (b) any other sum paid or payable otherwise than as income, being a sum which is not paid or payable for full consideration in money or money's worth.

 (5) For the purposes of subsection (3) above, there shall be treated as a capital sum which an individual receives or is entitled to receive any sum which a third person receives or is entitled to receive at the individual's direction or by virtue of the assignment by him of his right to receive it.

 (6) Income shall not by virtue of subsection (3) above be deemed to be that of an individual for any year of assessment by reason only of his having received a sum by way of loan if that sum has been wholly repaid before the beginning of that year.

 

s 747 Imputation of chargeable profits and creditable tax of controlled foreign companies.

 

Marginal Notes:

1) Finance Act 1984 (c.43), s.82

 (1) If in any accounting period a company--

 (a) is resident outside the United Kingdom, and

 (b) is controlled by persons resident in the United Kingdom, and

 (c) is subject to a lower level of taxation in the territory in which it is resident,

the provisions of this Chapter shall apply in relation to that accounting period.

 [ (1A) A company which would not, apart from this subsection, fall to be regarded as controlled by persons resident in the United Kingdom shall be taken for the purposes of this Chapter to be so controlled if--

 (a) there are two persons who, taken together, control the company;

 (b) one of those persons is resident in the United Kingdom and is a person in whose case the 40 per cent test in section 755D(3) is satisfied; and

 (c) the other is a person in whose case the 40 per cent test in section 755D(4) is satisfied.]

(2) A company which falls within paragraphs (a) to (c) of subsection (1) above is in this Chapter referred to as a &quotcontrolled foreign company".

 (3) Subject to section 748, where the provisions of this Chapter apply in relation to an accounting period of a controlled foreign company, the chargeable profits of that company for that period and its creditable tax (if any) for that period shall each be apportioned in accordance with section 752 among the persons (whether resident in the United Kingdom or not) who had an interest in that company at any time during that accounting period.

 (4) Where, on such an apportionment of a controlled foreign company's chargeable profits for an accounting period as is referred to in subsection (3) above, an amount of those profits is apportioned to a company resident in the United Kingdom then, subject to subsection (5) below--

 (a) a sum equal to corporation tax at the appropriate rate on that apportioned amount of profits, less the portion of the controlled foreign company's creditable tax for that period (if any) which is apportioned to the resident company, shall be chargeable on the resident company as if it were an amount of corporation tax chargeable on that company; and

 (b) if, apart from this paragraph, section 739 would deem any sum forming part of the company's chargeable profits for that accounting period to be the income of an individual for the purposes of the Income Tax Acts, that section shall not apply to such portion of that sum as corresponds to the portion of those chargeable profits which is apportioned to companies which are resident in the United Kingdom and which, by virtue of paragraph (a) above, have a liability to tax in respect thereof;

and for the purposes of paragraph (a) above &quotthe appropriate rate" means the rate of corporation tax applicable to profits of that accounting period of the resident company in which ends the accounting period of the controlled foreign company which is mentioned in subsection (1) above or, if there is more than one such rate, the average rate over the whole of that accounting period of the resident company.

 (4A) Where by virtue of section 747A a company's chargeable profits for an accounting period are to be computed and expressed in a currency other than sterling, for the purposes of subsection (4)(a) above the apportioned amount shall be taken to be the sterling equivalent of the apportioned amount found in the currency other than sterling.

 (4B) The translation required by subsection (4A) above shall be made by reference to the London closing exchange rate for the two currencies concerned for the last day of the accounting period concerned.

 (5) Tax shall not, by virtue of subsection (4) above, be chargeable on a company resident in the United Kingdom unless, on the apportionment in question, the aggregate of--

 (a) the amount of the controlled foreign company's chargeable profits for the accounting period in question which is apportioned to the resident company, and

 (b) any amounts of those chargeable profits which are apportioned to persons who are connected or associated with the resident company,

is at least 25 per cent. of the total of those chargeable profits.

 (6) In relation to a company resident outside the United Kingdom--

 (a) any reference in this Chapter to its chargeable profits for an accounting period is a reference to the amount which, on the assumptions is Schedule 24, would be the amount of the total profits of the company for that period on which, after allowing for any deductions available against those profits, corporation tax would be chargeable; and

 (b) any reference in this Chapter to profits does not include a reference to chargeable gains but otherwise (except as provided by paragraph (a) above) has the same meaning as it has for the purposes of corporation tax.

 

 

COMPANY DIRECTORS DISQUALIFICATION ACT 1986 CHAPTER 46

DISQUALIFICATION FOR UNFITNESS

 

s 6 Duty of court to disqualify unfit directors of insolvent companies.

 

(1) The court shall make a disqualification order against a person in any case where, on an application under this section, it is satisfied—

 (a) that he is or has been a director of a company which has at any time become insolvent (whether while he was a director or subsequently), and

(b) that his conduct as a director of that company (either taken alone or taken together with his conduct as a director of any other company or companies) makes him unfit to be concerned in the management of a company.

(2) For the purposes of this section and the next, a company becomes insolvent if--

(a) the company goes into liquidation at a time when its assets are insufficient for the payment of its debts and other liabilities and the expenses of the winding up,

(b) an administration order is made in relation to the company, or

(c) an administrative receiver of the company is appointed;

and references to a person's conduct as a director of any company or companies include, where that company or any of those companies has become insolvent, that person's conduct in relation to any matter connected with or arising out of the insolvency of that company.

(3) In this section and the next "the court" means--

(a) in the case of a person who is or has been a director of a company which is being wound up by the court, the court by which the company is being wound up,

(b) in the case of a person who is or has been a director of a company which is being wound up voluntarily, any court having jurisdiction to wind up the company,

(c) in the case of a person who is or has been a director of a company in relation to which an administration order is in force, the court by which that order was made, and

(d) in any other case, the High Court or, in Scotland, the Court of Session;

and in both sections "director" includes a shadow director.

(4) Under this section the minimum period of disqualification is 2 years, and the maximum period is 15 years.

 

6.-- Section 6: Duty of court to disqualify unfit officers of insolvent partnerships

 

(1) The court shall make a disqualification order against a person in any case where, on an application under this section, it is satisfied-

 

(a) that he is or has been an officer of a partnership which has at any time become insolvent (whether while he was an officer or subsequently), and

 

(b) that his conduct as an officer of that partnership (either taken alone or taken together with his conduct as an officer of any other partnership or partnerships, or as a director of any company or companies) makes him unfit to be concerned in the management of a company.

 

(2) For the purposes of this section and the next-

 

(a) a partnership becomes insolvent if-

 

(i) the court makes an order for it to be wound up as an unregistered company at a time when its assets are insufficient for the payment of its debts and other liabilities and the expenses of the winding up; or

 

(ii) an administration order is made in relation to the partnership; and

 

(b) a company becomes insolvent if-

 

(i) the company goes into liquidation at a time when its assets are insufficient for the payment of its debts and other liabilities and the expenses of the winding up,

 

(ii) an administration order is made in relation to the company, or

 

(iii) an administrative receiver of the company is appointed.

 

(3) For the purposes of this section and the next, references to a person's conduct as an officer of any partnership or partnerships, or as a director of any company or companies, include, where the partnership or company concerned or any of the partnerships or companies concerned has become insolvent, that person's conduct in relation to any matter connected with or arising out of the insolvency of that partnership or company.

 

(4) In this section and the next "the court" means-

 

(a) in the case of a person who is or has been an officer of a partnership which is being wound up as an unregistered company by the court, the court by which the partnership is being wound up,

 

(b) in the case of a person who is or has been an officer of a partnership in relation to which an administration order is in force, the court by which that order was made, and

 

(c) in any other case, the High Court

;

and in both sections "director" includes a shadow director.

 

(5) Under this section the minimum period of disqualification is 2 years, and the maximum period is 15 years.

 

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE

 

Sources anglaises

Livres:

 

Jurisprudence

§         Smith v Hancock [1884] 2 Ch 377.

§         Salomon v. Salomon & Co Ltd 1897 AC 22, HL.

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§         In re Slobodinsky Ex parte Moore [1903] 2 KB 517.

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§         Trustee of Gonville v Patent Caramel Company, Limited [1912] 1 KB 599.

§         In re Fasey Ex parte Trustee [1923] 2 Ch 1.

§         British Thomson-Houston Co Ltd v Sterling Accessories Ltd [1924] 2 Ch 33.

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§         Re William C. Leicht Ltd [1932] 2 Ch. 71.

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§         Re Patrick & Lyon Ltd [1933]Ch 786.

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§         Woolfson v Strathclyde Regional Council (1978) 38 P & CLR 567.

§         Adams v Cape industries Pty Ltd [1990] Ch 433.

§         Atlas Maritime Co SA v Avalon MaritimeLtd (N°1) [1991] 4 All ER 769.

§         The Coral Rose [1991] 1 Lloyd's Rep. 563.

§         Lonrho Plc. Respondent and Cross-Appellant v. Fayed and Others [1992] 1 A.C. 448.

§         Creasy v Breachwood Motors Ltd and others [1993] BCLC 480.

§         Re Polly Peck International plc [1996] 2 All ER 433.

§         Yukong Line Ltd v Rendsburg Investments Corporation (N°2) [1998] 1 WLR 294.

§         Ord v Belhaven Pubs Ltd [1998] 2 B.C.L.C. 447.

§         Trustor AB Claimant v. Smallbone And Others Defendants 2001 WL 239805 (Ch D), 3-30-2001 Times.

 

Articles:

§         Payne J., “Lifting the veil: a reassesment of the fraud exception”, CLJ 1997 56(2), p.284-290.

§         Powles D., “The "see-through" corporate veil”, MLR 40. p.339-343.

§         Pickering M., “The company as a separate legal entity”, MLR 31, p.481-511.

§         Rajak H., “Company directors- the end of an era ?”, NLJ 2000, p.1374, 1458.

 

Documents officiels:

 

Lois :

 

 

Sources françaises :

Livres:

§         Cozian M, Viandier, Deboissy F., Droit des sociétés, Litec, 1999.

 

Jurisprudence:

 

Articles:

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TABLE DES MATIERES

 

Introduction…………………………………………………………..…………4

 

Section 1. Exposé des diverses formes d'abus de la personnalité morale…………………………………………………………………..…….…...11

A L'abus de la responsabilité limitée………………………………...………11

§1 L'abus perpétré par une personne physique……..………………..……….12

a) L'abus: motif de la création de la société……………………...………………12

1° L’entrepreneur individuel créant sa société…………………….………….…..12

- Avant la reconnaissance de la société à membre unique………….…………….12

- Conséquences de la reconnaissance légale de la société unipersonnelle à responsabilité limitée………………………………………………….……….……16

2° L'utilisation de la limitation de la responsabilité par une personne physique pour se protéger de ses créanciers…………………………………………………….…..17

b) Les abus apparaissant dans une société originellement légitime……………...19

1° Les formes d’abus reconnues par la loi………………………………………..19

2° Les formes d’abus reconnues par la jurisprudence…………………………….23

§2 L'abus perpétré par une personne morale………………………………….24

a) L’abus: motif de la création de la société……………………………………...24

b) La société en difficultée………………………………………………………..28

B L’abus de la personnalité juridique de la société………………………...30

§1 La société créée pour échapper à une obligation…………………………...31

a) Pour échapper à une obligation contractuelle………………………………...31

b) Pour échapper à une exigence légale………………………………………….33

§2 Le cas particulier de la fraude fiscale…………………………….…………34

a) La fraude fiscale internationale……………………………………….……….34

b) La fraude fiscale interne……………………………………………………….37

Conclusion de la 1ère partie………...…………………………………………..39

 

 

 

Section 2 Les conséquences de l’abus de la personnalité morale…40

A Conséquences relatives à la personne morale…………………………….40

§1 Perte totale de la personnalité morale en droit français…………………...40

§2 Persistance de la personnalité morale………………………………………43

a) Les Conséquences relatives à la personnalité morale d’origine jurisprudentielle ……………………………………………………………………………………….43

b) Les conséquences relatives à la personnalité morale d’origine légale………..46

B Les conséquences relatives aux auteurs de l'abus de personnalité morale………………………………………………………………………………46

§1 Conséquences civiles…………………………………………………………46

a) Conséquences de droit commun et conséquences fiscales……………………..46

Conséquences issues du droit commun…………………………………………...46

Conséquences issues du droit fiscal………………………………………………48

b) Conséquences issues du droit de la procédure collective……………………...49

§2 Responsabilité pénale………………………………………………………...53

a) Droit pénal général…………………………………………………………….54

b) Droit pénal spécifique………………………………………………………….56

Conclusion de la 2ème partie………………………………………………59

 

Conclusion……………………………………………………………………...60

 

Annexes A : Législation française………………………………………………61

Annexes B : Législation anglaise…..……………………………………………64

Bibiographie…...…………………………………………………………………74

 



[1] Mondange C., « La transparence de la personnalité morale dans le droit anglais des sociétés anonymes », RIDComp 1980, p 573.

[2] Bastid, David, La personnalité morale et ses limites, LGDJ, 1960, p.3.

[3] Simonart V., La personalité morale en droit privé comparé, ULB, 1995, p.7.

[4]1897 AC 22, HL.

[5][1998] BCC 607, CA.

[6][1998] 1 WLR 830, HL.

[7]Cutajar-Rivière C., La société écran, LGDJ, 1998, p.292.

[8]Com 4 janv. 1982, Rev. Soc 1983, p.95; Com 24 mai 1982, Rev. Soc, 1983, p.361.

[9]Guyon, Droit des affaires, Ripert, Traité élémentaire de droit commercial; Cozian et Viandier, Droit des sociétés.

[10]MLR 1944 55.

[11] Calamitous.

[12]sous Cass 15 oct. 1974, Rev Soc 1975, p.496.

[13] Simonart V., La personnalité morale en droit privé comparé, ULB, 1995.

[14] Chauveau P., « Des abus de la notion de la personnalité morale des sociétés », Rev. Gén. dr. com., 1938, 1, p.409.

[15]Diener P., « Un abus de la personnalité morale: les sociétés en sommeil » in Dix ans de droit de l'entreprise, Litec, 1978.

[16]Cutajar Rivière C., La société écran, LGDJ 1998, p.280.

[17]Fadel Raad N., L'abus de la personnalité morale en droit privé, LGDJ, 1991.

[18]Cutajar Rivière C., La société écran , LGDJ 1998, p.281.

[19]Chauveau P., Les abus de la personnalité morale des sociétés, Rev gen dr com 1938, p.397.

[20][1973] AC 360.

[21] " ... a limited company is more than a mere judicial entity, with a personality in law of its own... there is room in company law for recognition of the fact that behind it, or amongst it, there are individuals with rights, expectations and obligations inter se which are not necessarily submerged in the company structure."

[22] "The doctrine in Salomon v Salomon & Co has to be watched very carefully. It has often been supposed to cast a veil over the personality of a limited company through which the courts cannot see. But that is not true. The court can and often draws aside the veil. They can, and often pull off the mask. They look to see what really lied behind. The legislature has shown the way, which group accounts and the rest. And the courts should follow suit."

[23]"abuse of the privilege of incorporation" dans Whincup M., “Inequitable incorporation the abuse of a privilege”, The Company Lawyer 1981 158 ; "abuse of the corporate form" dans Schmitthoff C., “Salomon in the shadow”, JBL 1976 305.

[24]"lifting the veil"

[25] [1991] 4 All ER 769.

[26] "to pierce the corporate veil is an expression that I would reserve for treating the rights or liabilities or activities of a company as the rights or liabilities or activities of its shareholders. To lift the corporate veil or look behind it, on the other hand, should lean to have regard to the shareholding in a company for some legal purpose."

[27] 1897 AC 22, HL.

[28]Fadel Raad N., L'abus de la personnalité morale en droit privé, LGDJ 1991.

[29] Jurisclasseur- Sociétés Traité 7-40 n°13.

[30] Art 1832 al. 1 Code civil.

[31]Cass. Com., 30 janv. 1961, Soc. Le Profil et autres c/ Soc. Ateliers de menuiserie rationelle, D. 1961 p. 292.

[32] Diener P., « Un abus de la personnalité morale: les sociétés en sommeil » in Dix ans de droit de l'entreprise, Litec, 1978 p.96 ; J.-P. Sortais, note sous Rouen 6 juin 1973, rev. Soc., 1974, p.747.

[33] Cass. 1ére civ. 26 mai 1954 : JCP 1954, 1, p.149 - 3 janv. 1961 : D 1961, p.292- 18 mars 1963 Bull. civ. III, n°159; cités par Jurisclasseur Sociétés Traité 7-40 n°19.

[34] Diener P., « Un abus de la personnalité morale: les sociétés en sommeil » in Dix ans de droit de l'entreprise, Litec, 1978, p.110.

[35] "It has decided that a company can be legitimately formed under the Companies Act by one or two persons, with all the rest men of straw, and that there is at present no machinery except winding-up by which it can be extinguished" [1911] 1 K.B. 95.

[36][1899] 1 QB 612, p.620.

[37] Salomon v Salomon and Co Ltd [1897] AC 22, HL.

[38] Gower, Principles of Company Law, Sweet & Maxwell, 1997, p.150.

[39] Cozian et Viandier, Droit des sociétés, Litec 1999,n°579.

[40] Diener P., « Un abus de la personnalité morale: les sociétés en sommeil » in Dix ans de droit de l'entreprise, Litec, 1978, p.118-119.

[41] Cass. Com 3 juin 1986, Rev. Soc. 1986, 585, note Y. Guyon.

[42] Schaeffer, Des causes d'ordre public de dissolution des sociétés in Dix de conférences d'agrégation, Etudes de droit commercial offertes à J. Hamel, n°16, p.236 cité par Diener P., « Un abus de la personnalité morale: les sociétés en sommeil » in Dix ans de droit de l'entreprise, Litec, 1978, p.118-119.

[43] Tsang L ;Company Lawyer, 1998 12(5), p.41.

[44] Gower, Principles of Company Law, Sweet & Maxwell, 1997, p.150.

[45]

" [...] I am quite clear that [the Liechtenstein concerns] were just the puppets of Dr. Wallersteiner. He controlled their every movement. Each danced to his bidding. He pulled the strings. No one else got within reach of them. Transformed into legal language, they were his agents to do as he commanded. He was the principal behind them. I am of the opinion that the court should pull aside the corporate veil and treat these concerns as beings his creatures_ for whose doings he should be, and is responsible." [1974] 3 All ER 217.

[46][1998] 1 WLR 294.

[47] Douzième Directive de droit des sociétés du Conseil 89/667CEE du 21 décembre 1989 sur la société unipersonnelle à responsabilité limitée.

[48] S.I. 1992 N° 1699.

[49] Loi n°75-697 du 11 juillet 1985 sur l’entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée et l'exploitation agricole à responsabilité limitée.

[50] s.24 Companies Act 1985.

[51]Maubru, « Abus de droit et fictivité des sociétés à l'épreuve de l'EURL », JCP 1986, éd. N. I, p.435, p.436.

[52] Mere sham.

[53] [1967] 2 Q.B. 786, 802.

[54][1899] 1 QB 612.

[55]

"Whether the creditors of a sole trader who had converted himself into a company, and transferred all his assets to the company, could not impeach the transaction either as a fraud upon the creditors under the Statutes of Elizabeth, or a as a act of bankruptcy under the Bankruptcy act.” QB [1899] 612, p.620.

[56][1903] 2 KB 517.

[57][1912] KB 599.

[58][1923] 2 Ch 1.

[59] Farrar, « Legal issues involving the corporate groups », (1998) 16 CSLJ, 184, cité par Mitchell C., « Lifting the veil in the English courts : an empirical study », CFILR 1999, p.15, p.16.

[60] « illusory reference to express the court’s disapproval of the use of the corporate form to evade obligations ».

[61] Payne J., « Lifting the veil: a reassesment of the fraud exception », CLJ 1997 56(2) 284.

[62] Cass. 1ére civ. , 27 févr. 1973, JCP 1973, éd. G, IV, p.141 - 21 juillet 1987, JCP 1987, éd. E, I, 16959 cités par Jurisclasseur Sociétés Traité 7-40 n°51

[63] Mayson, French & Ryan on Company Law, Blackstone, 1997, p.148.

[64] Delinquent director.

[65] Misfeasance.

[66] voir Re B. Johnson & Co. (Builders) Ltd [1955] Ch. 634.

[67] Pasban, « A Review of directors' liabilities of an insolvent company in the U.S. and England », J.B.L. 2001, JAN, 33-57.

[68] Gross negligence.

[69] voir l’arrêt de la chambre commerciale de la Cour de la cassation du 11 juin 1991 dans lequel le manque d’attention porté aux affaires d’une nouvelle société a été qualifié de faute de gestion, cité par Cozian Viandier, Droit des sociétés, Litec, 1999, n°439bis.

[70] Omar P., « France: Company directors' liabilities on insolvency », Comp. Law. 1997, 18(7), 220-224.

[71] « undivided loyalty » Pasban M., « A Review of directors' liabilities of an insolvent company in the U.S. and England », J.B.L. 2001, JAN, 33-57.

[72]"the most extreme departure from the rule in Salomon's case yet achieved in the United Kingdom." Gower, Principles of compay law, Sweet & Maxwell, 1997, p.151.

[73] [1933] Ch. 786, p.790.

[74]' The words "defraud" and "fraudulent purpose" are words which connote actual dishonesty involving, according to current notions of fair trading among commercial men, real moral blame'.

[75] [1932] 2 Ch. 71, p.77.

[76]"if a company continues to carry on business and to incur debts at a time when there is to the knowledge of the directors no reasonable prospects of the creditors ever receiving payment of those debts, it is, in general, a proper inference that the company is carrying on business with intent to defraud.".

[77] Re Produce Marketing Consortium (N°2) [1989] BCLC 520 (Chancery Division).

[78] Cozian et Viandier, Droit des sociétés, Litec, 1999, n°439.

[79] Omar P.,  « France: Company directors' liabilities on insolvency », Comp. Law. 1997, 18(7), p.220-224.

[80]"the assets of the company and of [the "maître de l'affaire"] have been so closely intertwined that the latter is to be considered a mere instrumentality” K. Hofstetter, Parent responsibility for subsidiary corporations: evaluating European trends, ICLQ 1990 30, p.576, p.584.

[81] D. 1988, Som., p.383.

[82] Gisserot F., « La confusion des patrimoines est-elle une source autonome d'extension de faillite ?, » RTDCom 1979, p.48.

[83] Barbièri J.F., « Confusion des patrimoines et fictivité des sociétés », PA 25/10/96, p.9.

[84] (1978) 38 P & CLR 567.

[85]"[I]f one subsidiary company is insolvent there is nothing beyond the pressure of public and market opinion, to prevent the holding company from putting it into liquidation and leaving its creditors to whistle for their money notwithstanding that the group as a whole is fully solvent." The principles of Modern Company law, 120 cité par Inequitable Incorporation - the abuse of a privilege, M. Whincup, Comp. Law. 1981, 158.

[86][1939] 4 All ER 116.

[87]Hotel Terrigal Pty v Latec Investments Ltd (N°2) [1969] 1 NSWR 676; Latec Investments Ltd v Hotel Terrigal Pty Ltd (1965) 113 CLR 265.

[88][1998] 1 WLR 294.

[89] CA Aix-en-Provence, 26 Mai 1981, D 1983, IR, p.60.

[90] S. 1947, 1, p.33 cité par Jurisclasseur 7-40, n°29.

[91] CA Colmar, 21 mars 1972; RTD com. 1973 cité par Jurisclasseur 7-40, n°29.

[92] Jurisclasseur Sociétés Traité, 7-40 n°32 CA Paris, 7 juillet 1995, JCP 1995, éd. E, I, 541; CA Paris, 16 janv. 1996, D .1996, IR, p.76.

[93] Cass. Req. 13 mai 1929 : S. 1929, 1, p. 289 - T. com. Seine, 20 déc. 1932 : Sem. Jur. 1933, p. 566 cité par Jurisclasseur Sociétés Traité 7-40, n°52.

[94] Cozian et Viandier, Droit des sociétés, Litec, 1999, n°1956.

[95] Mitchell C., « Lifting the veil in the English courts : an empirical study », CFILR 1999, p.15, p.23.

[96] [1991] 1 Lloyd's Rep. 563, p.571.

[97] « The creation or purchase of a subsidiary company with minimal liability, which will operate with the parent's funds and on the parent's directions but not expose the parent to liability, may not seem to some the most honest way of trading. But it is extremely common in the international shipping industry, and perhaps elsewhere. To hold that it creates an agency relationship between the subsidiary and the parent would be revolutionary doctrine. ».

[98] Cité par Rohart, « Faut-il se méfier de l’apparence, ou la saisie des navires apparentés », DMF, 1988, p.499.

[99] Cass. Com., 4 mars 1997: JCP E 1997, pan. 438, Rev. sociétés 1997, p.554 cité par Cozian Viandier, Droit des sociétés, Litec, 1999, n°1969.

[100]Single economic unit.

[101] [1976] 3 All ER 462, CA.

[102] [1990] Ch 433.

[103] Simonart, « La personnalité morale en droit privé », ULB, 1995, p.463.

[104] Bull. Joly 1994 §12.

[105] en ce sens Lord Wedderburn, « Multinationals and the antiquities of company law », MLR 47 p.87 et C. Schmitthoff, « The Wholly Owned and Controlled Subsidiary », 1978 JBL 218.

[106] Cheong Ann Png, “Lifting the veil of incorporation: Creasey v. Breachwood motors: a right Decision with the wrong reasons”, Comp. Law 1999, 20(4), p.122-125.

[107] Idolo Ogowewo, “A perfect case for the application of section 423 of the insolvency act 1986: Yukong Line Of Korea v. Rendsburg Investments Corp. Of Liberia (no. 2)”, Insolvency L.J. 1999, 3(APR), p.106-111.

[108] [1993] BCLC 480.

[109] « uneeded and unsound » Lord Coooke, Turning point of the Common law, Hamlyn lectures, London 1997 ; cité par Mitchell C., “Lifting the veil in the English courts : an empirical study,” CFILR 1999, p.15

[110] Lifting the veil of incorporation: Creasey v. Breachwood motors: a right Decision with the wrong reasons, Comp. Law. 1999, 20(4), p.122-125.

[111] [1998] 2 B.C.L.C. 447.

[112] Dora v Simper Times, May 26, 1999 (Ch D).

[113] (1978) 38 P & CLR 567.

[114] « […]a company de facto engaged in business in accordance with its memorandum of association »

[115] [1967] 2 Q.B. 786, p.802.

[116] WLR 1998 p.297.

[117] « to encompass the activities of a company set up for the sole purpose of attempting to defeat […] contractual restrictions…».

[118] [1911] 1 K.B. 95.

[119] "the courts will not allow the corporate form to be used for the purposes of fraud or as a device to evade a contractual or other legal obligation".

[120][1933] Ch 935.

[121]"The defendant company is the creature of the first defendant, a device and a sham, a mask which he holds before his face in an attempt to avoid recognition by the eye of equity."

[122][1962] 1 All ER.

[123]"(i) that the defendant company was, and at all material times had been, under the complete control of the first defendant, and (ii) that the acquisition of the defendant company by the first defendant and the transfer to it of the real property comprised in the contract with the plaintiffs was carried through solely for the purpose of defeating the plaintiff's right to specific performance...»

[124] CA Poitiers, 22 mai 1974: JCP 1977, éd. G, II, 18591: Cass. 3e civ., 4 mars 1971, JCP 1972, éd. G, II, 16983 cité par Jurisclasseur Sociétés Traité 7-40 n°60.

[125] Cass. com. 19 janv. 1981, Bull. Civ. IV, n°33; 13 février 1990, Bull. Civ. IV, n°38 cité par Jurisclasseur Sociétés Traité 7-40 n°63.

[126] [1962] 2 Q.B. 173.

[127] Palmer, Company Law, Butterworth, 1995, §2.1521.

[128] Bull civ., I, n°86.

[129] Cass. soc., 8 juin 1971, Bull. Civ. V; n°418 cité par Jurisclasseur Sociétés 7-40, n°71.

[130] Cass crim, 4 juillet 1956, D. 1956, p.720.

[131] Diener P., « La « défiscalisation » par entreprises fictives », D. 92 Chron., p.181, p.184.

[132] Deboissy F., La simulation en droit fiscal , LGDJ, 1997, p.342.

[133][1906] AC 455 HL.

[134]Central management.

[135] « the avoiding by individuals ordinarily resident in the United Kingdom of liability to income tax by means of transfers of assets by virtue or in consequence of which, either alone or in conjunction with associated operations, income becomes payable to persons resident or domiciled outside the United Kingdom.».

[136] [2000] Q.B. 744.

[137] [1996] S.T.C. 1418.

[138] “that the transactions were undertaken without dishonest intention as part of a legitimate tax planning scheme.”.

[139][1953] 1 WLR 483.

[140][1957] 1 WLR 464, HL.

[141] [1908] 2 KB 89.

[142][1921] 2 KB 492 CA.

[143]"if a subsidiary is dealing with its own assets and business it is not the agent of the holding company.", “The company as a separate legal entity”, Pickering M., MLR 31, 481, p.493.

[144][1960] AC 351.

[145] Deboissy F., La simulation en droit fiscal, LGDJ, 1997, p.342.

[146] Deboissy F., La simulation en droit fiscal, LGDJ, 1997, p.311.

[147] Cosson J., Les industriels de la fraude fiscale, Seuil, 1971.

[148] Maubru B, « Abus de droit et fictivité des sociétés à l'épreuve de l'EURL », JCP 1986, éd. N. I, p.435

[149] Cass. crim., 28 oct. 1991: Bull. Joly 1992, p.220 cité par Jurisclasseur Sociétés Traité 7-40 n°53.

[150] CE, 7e et 9e sous-sect. , 27 févr. 1980, req. N°13239: Dr. Fisc. ,n°22-23 cité par Jurisclasseur Sociétés Traité 7-40 n°54.

[151] Furniss v Dawson HL 1984, 55 TC 324.

[152] Tiley, Revenue Law, Hart Publishing, 2000, p.88.

[153]Close companies.

[154] Davies, Principles of Tax Law, p.199.

[155] CA Aix-en-Provence, 7 avr. 1970, JCP 1970, éd. G, II, 16466 cité par Jurisclasseur Sociétés Traité 7-40 n°79.

[156] Morse et Williams, Davies: Principles of Tax Law, Sweet & Maxwell, 2000, p.199.

[157] Morse et Williams, Davies: Principles of Tax Law, Sweet & Maxwell, 2000, p.199.

[158] Fadel Raad N., L’abus de la personnalité morale en droit privé, LGDJ, 1991.

[159] Collet, Note sous com. 16 juin 1992, D. 1993, p.509.

[160] Fadel Raad N., L'abus de la personnalité morale,LGDJ 1991, p.222.

[161] Bull. Joly 1991, § 59, p.190.

[162] voir la note de Diener P. sous CA Paris 16 novembre 1993, Joly 1994 § 12.

[163] D. 2000, Som. p.389.

[164] Dagot, La simulation en droit privé, LGDJ, Paris, 1967 cité par Cutajar-Rivière C., La société écran, LGDJ, 1998, p.345.

[165] « Il est admis que la maxime "Nemo auditur" (nul ne peut invoquer sa propre fraude) est écartée en matière de simulation, même si le but est frauduleux », RTD com., 1956, p. 278, « Remarque sur la conception jurisprudentielle de l'acte simulé », Bredin.

[166] Rouast-Bertier P., « Société fictive et simulation », Rev. Soc. 1993, p.725, p.743.

[167] Cass. Com. 30 mai 1978 JCP 1979, II, 19087 cité par Cozian Viandier,Droit des sociétés, n°579.

[168] JCP E 1978 éd. Cl 12653 cité par Cozian Viandier, Droit des sociétés, Litec, 1999, n°579.

[169] Com. 28 janv. 1992, JCp, G, II, 21994, D 1993 p 23 cité par Cutajar-Rivière, La société écran, LGDJ, 1998, p.380.

[170] Vidal, Théorie générale de la fraude en droit français, Dalloz, 1957, Niboyet, Traité, T. III, n°1090 cités par Cutajar-Rivière C., La société écran , LGDJ, 1998, p 395.

[171] Jurisclasseur Sociétés Traité 7-40 n°115 et s..

[172] [1921] 2 A.C. 465, p.475.

[173][1933] Ch 935.

[174][1962] 1 All ER.

[175] Lord Cooke, Hamlyn Lecture, p17.

[176] [1912] 1 KB 599.

[177] [1903] 2 KB 517.

[178] [1993] BCLC 480.

[179] Creasy v. Breachwood Motors Ltd cité par J. Payne, « Lifting the veil a reassessment of the fraud exception », BLJ 56 (1997) 284, p 288.

[180] Adams v. Cape cité par Payne J., « Lifting the veil a reassessment of the fraud exception », BLJ 56 (1997) 284, p.287

[181] Gisserot F., « La confusion des patrimoines est-elle une source autonome d'extension de faillite ? », RTDCom 1979, p.48.

[182] Soinne B., « Identité ou diversité des notions de fictivité et de confusion des patrimoines A propos de l'arrêt de la Cour d'Appel de Douai du 6 octobre », PA, 6 déc. 1995, p.12,p.17.

[183] Cutajar Rivière C., La société écran, LGDJ, 1998, p.253.

[184] Cass. Com., 4 mars 1997: JCP E 1997, pan. 438, Rev. sociétés 1997, p.554 cité par Cozian Viandier, Droit des sociétés, n° 1969.

[185] en ce sens voir Cutajar-Rivière C., La société écran, LGDJ, 1998, p.402.

[186] Trib. Com. Paris, 6 avr. 1992, Jurisdata, N°041149 cité par Cutajar-Rivière, La société écran, LGDJ, 1998, p 403.

[187] [1967] Ch. 889 (C.A.) from Palmer's Company Law 18-21.

[188] « the money becomes part of the general assets of the company available for all creditors: the legal persona of the company is fully respected ».

[189] Gilford Motor Company, Limited v Horne [1932] 1Ch 935.

[190]Maubru B., « Abus de droit et fictivité des sociétés à l'épreuve de l'EURL », JCP 1986, éd. N. I, 435 p.438 ; par ex. Cassation Commerciale, 8 juillet 1997 - Dalloz 1997, IR 182.

[191] [1936] AC 1, 1919 TC, 490.

[192] Firestone Tyre and Rubber Co. Ltd v. Lewellin [1957] 1 All ER.

[193] [1984] STC 153.

[194] Pasban M., « A Review of directors' liabilities of an insolvent company in the U.S. and England », J.B.L. 2001, JAN, 33-57.

[195] Dawson K., « Directors' disqualification: law and practice. 1999 », I.C.C.L.R. 2001, 12(1), 44.

[196] Pasban M., « A Review of directors' liabilities of an insolvent company in the U.S. and England », J.B.L. 2001, JAN, 33-57.

[197] [1987] 3 B.C.C. 532.

[198] [1998] 2 B.C.L.C. 485.

[199] Rajak H., « Company directors- the end of an era ? », NLJ 2000, 1374.

[200]Wrongful trading, NLJ 2000, 1458.

[201] (1989) 5 BCC 569.

[202] Simmons M., « Wrongful trading », Insolv. Int. 2001, 14(2), 12-16.

[203] Simmons M., « Wrongful trading », Insolv. Int. 2001, 14(2), 12-16.

[204] Rajak H.,  « Company directors- the end of an era ? », NLJ 2000, 1374.

[205] [2000] Ch. 446.

[206] D. 1988, Som. p.383.

[207] Fadel Raad N., L'abus de la personnalité morale en droit privé, LGDJ 1991, p.277.

[208] Cass. com., 6 juin 1995, RJDA 95-7, § 903 cité par Omar P., « France: Company directors' liabilities on insolvency, Comp. Law. 1997, 18(7), 220-224.

[209] « Acquisitions Cessions Restructurations », Arthur Andersen, février 199,7 N°7.

[210] Fadel Raad N., L’abus de la personnalité morale en droit privé, LGDJ 1991, p.6.

[211] Cutajar Rivière C., La société écran, LGDJ, 1998, p.420.

[212] Cass. com., 28 février 1995, BRDA 95-5 3 cité par Omar P., « France: Company directors' liabilities on insolvency », Comp. Law. 1997, 18(7), 220-224.

[213] Daigre J.J., « Le traitement du surendettement, générateur de responsabilités table ronde animée par M. Jean-Jacques Daigre », http://www.ccip.fr/creda.

[214] Fadel Raad N., L’abus de la personnalité morale en droit privé, LGDJ 1991, p.256.

[215] (1985) 7 Cr. App. R. (S.) 115.

[216] [1998] Crim. L.R. 298.

[217]Leigh, The control of commercial fraud, Heinemann, 1982, p.19.

[218] [1992] 3 WLR 1067.

[219] en ce sens voir Dine J., Criminal Law in the company context, Darmouth, 1995, p.131.

[220] In McHugh & Tringham (1988) 88 Cr App R 385 (CA).

[221] (1989) 89 Cr. App. R. 290.

[222] Le délit d'abus de biens sociaux en droit positif, sous la direction de Fabrice Rizzo, Maître de conférences, 1998.

[223] Le délit d'abus de biens sociaux en droit positif, sous la direction de Fabrice Rizzo, Maître de conférences, 1998.

[224] Cutajar-Rivière C., La société écran, LGDJ, 1998, p.414.

[225] Crim. 21 janv. 1975, B. n°60 cité par Jeandidier, Droit pénal des affaires, Dalloz, p.167.

[226] Giudicelli-Delage G., Droit pénal des affaires, Mémento Dalloz, 1999.

[227] STC [1999] STC 846.

[228] Tiley, Revenue Law, Hart Publishing, 2000, p.78.